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22 avril pour nous

Hier, Montréal était en suspens. Ce n’était pas un jour de courses ou de brunchs ; de blitz d’étude à la dernière minute ou de flâneries dans les parcs. Ce n’était pas un jour de weekend, ce n’était pas un jour de grasse matinée ; ce n’était pas un dimanche de printemps : c’était le 22 avril 2012. Le tant attendu Jour de la Terre, le beau trip à Champagne pis sa gang, partagé avec quelques 250 000 badauds épris d’une verve revendicatrice qu’ils ne se connaissaient peut-être même pas.

Et après on nous dira encore que le Québec est un peuple apathique et démobilisé. Pas si sûre.

On nous dira que la jeunesse est complaisante et trop gâtée pour se responsabiliser. Que la classe moyenne n’a que faire de la solidarité sociale et du bien commun, trop préoccupée par le fait de sauver son propre cul. Que les aînés se désintéressent du sort de leurs descendants ou que le Québec ne veut pas assurer la pérennité de ses institutions sociales démocratiques et qu’il s’abandonne à la tentation néolibérale.

Aujourd’hui, ce genre de discours serait en décalage avec les événements.

Un souffle mobilisateur soulève le Québec ; propulsant l’éveil de gens qui auparavant ne prenaient plus la peine de s’exprimer. Ou étaient carrément en mal de réflexion sur eux-mêmes, sur leur rapport avec la collectivité.

P’t’être bien qu’on charrie avec notre « Printemps québécois », mais il n’en demeure pas moins qu’on assiste présentement à un grand moment pour l’éveil de la conscience populaire. Au point où il devient pertinent de faire mention d’une manif pour le « bien commun » sur un blogue mode, tsé.

Il semblerait que toutes les sphères d’intérêts et toutes les strates de la société de consommation soient interpellées par la mouvance en cours. Non pas que tous emboîtent systématiquement le pas (à ce que je sache, les bancs du HEC sont pleins et les jeunes libéraux existent encore), mais le questionnement est étalé sur l’autel du débat public.

À prendre ou à laisser ; c’est à votre discrétion. Mais il y a un gros éléphant blanc qui marche sur la province : difficile d’en faire fi.

Je ne sais pas ce qui émergera de ce « Printemps québécois ». Pas Mai 68, pas le déclin annoncé de la globalisation, pas l’anarchie ni la Révolution. Wô.

Simplement, aujourd’hui, on réapprend à se dire « nous ».

C’est certain que des cyniques, il y en aura toujours. Bien des gens pour rire de la mobilisation et en décrier le manque d’impacts immédiats/concrets. Comme si les foules se soulevaient vainement en pelletant de gros cumulo-nimbus d’illusions. Certes, marcher dans la rue et hisser haut l’étendard du bien commun ne changera pas la face du monde demain matin, mais ça insufflera certainement l’envie d’essayer de faire notre bout de planète quelque chose qui se peut.

Ce n’est pas la conséquence directe de la lutte qu’il faille mesurer, mais bien la lutte en elle-même. Quitte à ce qu’il faille recommencer encore et encore. En un sens, nous sommes tous d’infatigables petits Sisyphe qui luttent par devoir, par nature. Et justement, autant se répéter cette phrase qui, un jour, m’a profondément marquée :

« La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir le cœur d’un homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux. »

C’est du Camus, en passant.

À plus!

 

 

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