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L’hypocondrie : un mal pas si imaginaire que ça
Crédit: Pierre Babin

Les dernières années ont été pas mal rough pour moi. J’ai eu un cancer cervical, la sclérose en plaques, le lupus, la leucémie et même de l’arthrite chronique (j’ai 28 ans). C’est à se demander comment j’ai réussi à concilier travail, études et relation amoureuse avec toutes ces maladies!  
 
En fait, elles n’étaient pas réelles. Du moins, pas physiologiquement. Mon cerveau me joue des tours sauf que, pour lui, elles étaient bien là.
 
Oui, je suis hypocondriaque.
 
La peur irraisonnée de la maladie n’est pas quelque chose de nouveau chez l’être humain. Souvent dépeint avec ironie (on peut penser à Woody Allen ou au Malade imaginaire de Molière), l’hypocondrie a pris la forme d’une blague dans l’imaginaire collectif. Croyez-moi, il n’y a rien de drôle dans le fait de vivre cette angoisse tous les jours.
 
Dans mon cas, je ne sais pas d’où ça vient. Je n’ai jamais été très malade ni hospitalisée. J’ai vu une seule personne succomber à un cancer, mon grand-père (love you, papi René). Malgré tout, j’ai toujours eu peur de perdre le contrôle sur mon corps et de souffrir toute seule. C’est comme ça.
 
La peur peut être sournoise; elle se faufile tranquillement sans trop se faire voir et, un jour, quand elle décide de sortir sans crier gare, elle envahit notre quotidien. Je vais toujours me souvenir du moment où tout ça a dégénéré.
 
En gros, je suis allée chez le gynécologue pour un examen et il a fait un commentaire douteux (je vous épargne les détails). Il m’a ensuite annoncé que j’avais soit une MTS, soit un cancer. Une MTS? Pas possible. J’avais le cancer, that’s it. Finalement, une biopsie a confirmé que j’étais en parfaite santé physique. Est-ce que ça m’a rassuré? Non. Ce que je vais avouer va peut-être vous choquer, mais tant pis : je ne crois pas les médecins et je fais rarement confiance à leurs tests. La peur est plus forte.
 
Depuis cette rencontre avec le gynécologue maudit, chaque étourdissement, chaque rougeur, chaque grain de beauté qui apparaît (oui, je m’en aperçois) et chaque spasme musculaire me font CA-PO-TER. Je tombe alors dans un cercle vicieux qui consiste à me faire rassurer par mes proches (c’est certain que je les énerve, mais ils sont trop fins pour me le dire), à « googler » mes symptômes (pour me rassurer aussi, mais au final, je me rappelle seulement des trucs terrifiants) et à m’imaginer aux prises d'une maladie incurable. Je vais donc passer des tests médicaux souvent inutiles. La voie que mon cerveau choisit pour analyser mes sensations corporelles est devenue une autoroute de fausses interprétations. Résultat : anxiété généralisée et incapacité de vivre le moment présent.
 
C’est difficile d’écrire ce texte parce que je sais qu’il sera lu par des gens près de moi, mais qui ne connaissent pas l’ampleur réelle et la gravité de mon trouble anxieux. En général, je le cache parce j’ai j’avais honte.  
 
Les hypocondriaques sont rarement pris au sérieux. Ils sont souvent ridiculisés et catégorisés comme des personnes voulant de l’attention à tout prix. C’est tellement faux! J’ai de la difficulté à croire que quelqu’un pourrait s’infliger toute cette angoisse juste pour de l’attention.
 
Aujourd’hui, je veux briser le silence sur ma condition parce que, quand j’étais vraiment down, j’aurais aimé savoir que je n’étais pas seule et que quelqu’un, quelque part, me comprenait. J’aurais tellement voulu me faire dire autre chose que « c’est dans ta tête ». Bien sûr que c’est dans ma tête, mais comment faire pour vivre sa vie quand notre tête est notre ennemie?
 
Je ne peux malheureusement pas encore répondre à cette question avec certitude. Comme pour tous les troubles mentaux, le chemin vers la guérison est souvent compliqué, frustrant et dispendieux. Cependant, il existe et on peut s’en sortir. J’en suis la preuve. Il n’y a pas si longtemps, je n’arrivais plus à vivre normalement. Par contrte, grâce à un début de psychothérapie, à ma volonté d’aller mieux, à l’organisme Revivre et au soutien de mon entourage, ça se règle tranquillement.
 
Êtes-vous hypocondriaques ou connaissez-vous quelqu’un qui souffre de ce trouble psychologique? 

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