Comme personne ayant un syndrome d’Asperger, je suis habituée à certains préjugés tenaces qui sont pourtant largement dépassés. Il m’arrive parfois de devoir faire de l’éducation, c’est-à-dire de spécifier que non, les personnes Asperger n’ont pas toutes des « dons d’autistes » ou ne sont pas simplement des « génies qui souffrent de timidité ».
Avec notre situation actuelle et le confinement, j’ai remarqué que ce moment pouvait être propice à ce genre de remarques. Il n’y a pas très longtemps, j’ai lu le témoignage d’une personne autiste qui s’est fait dire en rigolant qu’elle devait être très heureuse puisqu’elle était « faite pour le confinement ».
« Faite pour le confinement ». Sérieux…
Déjà, il est plus que temps de cesser de faire l’association que personne autiste = solitaire. Cette condition n’a rien à voir avec la personnalité. Tu peut être autiste et préférer être entouré.e autant que tu peux être autiste et apprécier la solitude.
Je trouve ça dommage que même dans une situation d’urgence, il y a encore du monde qui se base sur des préjugés pour évaluer le vécu des autres sans leur poser de question. Oui, c’est peut-être une joke amicale, mais une joke pas super drôle. Surtout là, là. Dans une période où plusieurs institutions spécialisées sont fermées et que nous sommes nombreux.ses à ne pas recevoir l’aide spécialisée dont nous avons besoin, ainsi que nos proches.
Comme personne autiste, il est difficile de se faire entendre lorsque nous parlons de nos neuroatypies* (y compris par les services spécialisés!). Lorsque nous y arrivons, ce n’est pas le moment de se faire ridiculiser ou ignorer. Il ne s’agit pas de charmantes lubies ou d’excentricités volontaires de notre part à prendre avec des pincettes. Nous avons besoin de vous comprendre et que vous nous comprenez.
Je ne parle pas seulement des personnes autistes. J’ai aussi entendu quelqu’un dire que les personnes vivant avec un trouble obsessif-compulsif, doivent présentement « s’intoxiquer aux produits ménagers tellement elles ont peur d’attraper la Covid-19 ». Comme si cette condition ne se résumait qu’à la peur d’être malade ou d’être accro au ménage. Ces petites phrases peuvent sembler banales si elles sont dites en l’air, comme ça, mais elles peuvent être dévastatrices. C’est exactement ce genre de choses qui invisibilise tous ceux qui vivent avec des conditions particulières.
Pourtant, les personnes neurodivergentes, tout comme les personnes neurotypiques vivent toutes la situation de confinement d’une manière différente, peu importe leur diagnostic. Je connais des gens qui partagent ma condition et qui vivent le confinement avec difficulté, alors que je le vis relativement bien. Quoi qu’il en soit, je préfère me demander comment une personne ressent son quotidien plutôt que de me fier à des catégories dans lesquelles on range les gens sans prendre en compte leur vécu et leur histoire. La personne doit toujours être mise de l’avant par rapport au diagnostic et c’est plus que jamais le moment de le démontrer!
N’oubliez pas qu’avoir une condition mentale est tout aussi valide que de vivre avec une condition physique. Il est important de demander de l’aide lorsque vous ressentez le moment de le faire et surtout, d’être écouté.e.
Consultez les ressources de la Fédération Québécoise de l’Autisme et si vous ressentez des inquiétudes par rapport au coronavirus, vous pouvez composer le 811, où de l’aide psychosociale est offerte de manière gratuite et confidentielle, 24 heures sur 24.
*La neuroatypie est un fonctionnement psychologique ou neurologique qui est considéré comme hors norme par la société.