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Hommage aux journées molles
Crédit: Svitlana Sokolova/Shutterstock

En août 2016, j’ai dû prendre une (longue) pause de mon emploi parce que j’étais pu fonctionnelle. Zéro.

Je réécrirai certainement sur le sujet éventuellement. Pour le moment, j’en suis encore à ordonner le puzzle de comment j'en suis rendue là. J’ai la majorité des pièces, la plupart sont placées, mais quelques interrogations demeurent. Notamment, je ne sais pas encore tout à fait pourquoi je n’ai pas davantage pris soin de moi. Pas « prendre soin de moi » dans le sens de m’épiler les mollets là, plus dans le sens de dorloter mon potager intérieur. Je ne sais pas pourquoi je ne l’ai pas fait, mais je sais que je ne l’ai pas fait.

J’aurais pu dire « non ». J’aurais pu dire « j’ai besoin ». J’aurais pu dire « je ne suis pas capable ». Ancrée en moi, comme une vieille habitude, se trouvait la peur de décevoir, d’être vulnérable ou de blesser. Elle est encore là, un peu, beaucoup, mais moins. Quand je ne suis jamais contente de moi, quand j’angoisse lorsque je dis non, quand je me tape sur la tête d'annuler, quand j’ai peur que mes ami.e.s me trouvent poche. Sauf que j’apprends à dire Fuck ça, petits pas de souris après petits pas de souris.

Je crois que prendre soin de soi, ça commence par reconnaître ses limites pis par les trouver tiguidou. La fatigue psychologique existe. Je pourrais citer des études pour les sceptiques, mais j’ai une tête pis souvent elle est fatiguée, ce qui constitue à mon sens une preuve suffisante. That’s it. J’ai découvert que ce qui la rend fatiguée, c’est un peu mon anxiété, beaucoup de pas dire non et surtout de ne jamais demander d’aide. Ça me dérange que prendre congé soit mal vu. Ça me dérange de me trouver poche quand je passe une journée à ne rien faire.

Je ne suis pas capable de tout faire. Ma tête a besoin de repos, comme mon corps. Pourquoi on prend une journée off pour une grippe, mais pas pour donner du lousse à notre tête? Je ne sais pas. Pourquoi, tant qu’il y a des cases de libres sur son calendrier, on accepte de les remplir? Mystère. La douce ironie, c’est que je ne peux pas pointer la pression de mon milieu ; j’ai l’immense privilège d’être entourée d’humain.e.s sensibles, doux, empathiques. D’humain.e.s qui m’encouragent à prendre soin de mon dedans. Et j’ai des congés payés, luxe inaccessible pour plusieurs. Le problème vient-il d’ailleurs? Y a-t-il une pression malsaine qui s’introduit dans les cocos pour faire croire que c’est wrong de prendre une pause? Serait-ce le culte de la performance? La honte de ne pas être occupé?

J’ai beaucoup de questions sans réponses et peu de certitudes. Au final, j’ai l’impression que c’est un savant cocktail d’un peu tout ça. Je crois profondément que la santé mentale ne reçoit pas l’attention qu’elle mérite. Je ne connais personne qui marcherait sur sa jambe cassée, alors que j’observe des ami.e.s en détresse se convaincre qu’ils/elles ont du jus pour fonctionner. La santé c'est le dehors et aussi le dedans. Je me frustre de constater qu’on doit se justifier quand on dit non. Je ne peux pas. Je ne veux pas. Je ne le ferai pas. 

Les journées off, ce n’est pas seulement par rapport au travail. Ça peut être aussi de ne pas charger ses journées de congé au point où elles ne sont plus des journées de congé. Ne pas courir. Faire des choses pour soi. Apprécier les journées molles. 

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