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Avoir le sentiment d’appartenance écorché
Crédit: Photo Bruce Mars/Pexels

Ma meilleure amie et moi faisons partie des quelques rares finissant.es du secondaire qui sont immédiatement parti.es hors de notre petite région éloignée après la graduation en 2005. Ça peut sembler plutôt commun, mais partir de sa petite ville de 6 000 âmes à 16 ans, c’était assez audacieux pour nos parents et notre entourage à l’époque.

Mon amie est partie vers Montréal et moi vers le Saguenay. On s’est souvent revues dans divers endroits au fil des 14 dernières années, mais ça faisait drôlement longtemps qu’on n’avait pas eu la chance de passer du temps dans notre petite ville natale ensemble.

Pendant qu’on mangeait une patate frite de la bonne vieille cantine du coin, on regardait par la fenêtre et on se disait que le temps avait donc passé. Il est étrange de partir, évoluer et revenir ensuite dans notre ancien chez soi qui n’en est plus vraiment un. C’est comme si tout et rien n’avait changé, à la fois. On a plusieurs amis qui sont restés ici depuis toujours et qui ont continué d’y évoluer et il y a nous, les éternelles absentes qui revenaient de temps à autre.

There’s nothing like home, qu’on dit. Mais quand notre «home» n’est plus le «home» d’antan, c’est bizarre.

De mon côté j’ai vécu de longues années dans une autre région du Québec, mais aussi à l’extérieur du Canada. J’ai appris à me fabriquer un cocon temporaire, me trouver des repères qui me faisaient sentir bien et adaptée.

Il n’en reste pas moins que mes souvenirs d’enfance et de jeune adolescente sont tous rattachés à ma ville natale, comme ceux de mon amie. Quand on se promène dans les rues, on se rappelle le bon vieux temps, mais on ne peut que constater que les choses ont aussi changé ici, sans nous. Notre école primaire n’en est plus une, notre endroit pour sortir est devenu un salon funéraire, le joli boisé à l’entrée de la ville fait place à une autoroute, de nouveaux quartiers sont apparus, etc.

Le fait d’avoir «manqué» tous ces changements qui se sont faits progressivement pour ceux qui étaient ici rend l’adaptation à ceux-ci un peu étrange quand on revient. Il y a un fossé entre nos souvenirs et la réalité.

C’est comme une nostalgie qui donne envie de revenir à cette époque, comme une chanson triste des Cowboys fringants. Ça fait que quand ma bonne amie et moi on se rejoint, on se met à imaginer ce que ça aurait pu être de rester ici, comme les autres. Qu’est-ce qu’on serait devenues?

D’un autre côté, il y a ce sentiment que les choses ont été comme elles devaient être et qu’on ne veut rien changer à tout ce qu’on a fait.

J’imagine que ce qu’on appelle «bien vieillir» signifie accepter tout ça et vivre en paix avec nos décisions.

Je pense qu’on devrait y arriver un jour!

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