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Le Dr Arruda et une danse qui fait des vagues
Crédit: Capture d'écran/YouTube

Je m’attends un peu à des avis très contraires au mien avec cet article, mais c’est correct. Je trouvais pertinent de faire un retour sur une situation franchement dommage qui s’est déroulée cette semaine et qui rappelle l’importance de connaître toutes les facettes d’un conflit avant de porter un jugement.

 

Le Dr Horacio Arruda a dansé sur une vidéo du rappeur québécois Rod le Stod, sans trop savoir dans quoi il s’embarquait. Lors du lancement de ladite vidéo, les avis étaient mitigés. Est-ce qu’un docteur, et de surcroît le directeur national de la santé publique, a le temps de danser aussi innocemment alors que des milliers de Québécois meurent? Là résidait le principal commentaire de ses détracteurs. Personnellement, je n’en ai pas fait grand cas. Le déhanchement du Dr Arruda m’a fait sourire, sans plus.

 

Il avait été annoncé par le rappeur que tous les profits de l’écoute et de la vente de la chanson iraient à l’organisme le Refuge des jeunes de Montréal, qui vient en aide aux jeunes itinérants. Et c’est ici que la vraie controverse a débuté. Rod le Stod n’a pas pris la peine d’avertir à l’avance l’organisme de sa décision de lever des fonds pour eux et le Refuge a décidé de refuser les dons. Ça peut vous sembler anodin – « voyons, devons-nous demander la permission pour faire un don à un organisme chaque fois qu’on veut donner des sous? », que je vous vois vous demander… Non, mais lorsque le don est accompagné de la présence d’une personnalité publique et surtout, lorsqu’il est associé à une chanson, des mots, un poème, name it, ça doit passer par une approbation préalable de l’organisme, c’est simplement normal. Pourtant, malgré une lecture plutôt simple à faire de la situation, j’ai vu des flambées immenses de haine à l’égard du Refuge et surtout de la directrice, France Labelle. J’ai lu des centaines de commentaires sous divers articles la traitant de tous les noms, rabaissant son autorité et son intelligence. J’ai aussi vu des centaines d’appels au boycott de l’organisme; « s’ils peuvent se permettre de refuser cet argent-là, ils peuvent se passer de tous nos dons aussi hein. »

 

Pardon?

 

Je crois que quelque chose a été largement échappé ici. Ce que ces centaines d’internautes ne semblent pas saisir, c’est que le refus d’accepter ce don bien précis est entièrement justifiable. Dans un article de La Presse, Caroline Bergeron, responsable du programme de gestion philanthropique à l’Université de Montréal, explique le refus du Refuge en ces mots très simples : « L’organisme a la responsabilité de s’associer ou non à un donateur, précise-t-elle, mais on ne peut pas inclure un organisme sans l’avoir au préalable contacté. On ne peut pas faire un partenariat sans avertir le partenaire, illustre-t-elle. C’est une faute d’étiquette, de mauvaise pratique. »

Dans une publication partagée sur Facebook, le Refuge explique ressentir un malaise face au timing de la vidéo et par respect envers la population qu’il dessert – les jeunes itinérants – il souhaite se dissocier de la chose.

 

Suite à la vidéo mise en ligne aujourd’hui, présentant une chorégraphie du Docteur Horacio Arruda et de Rod Le Stod au…

Posted by Refuge des Jeunes de Montréal on Monday, May 11, 2020

 

Quand on écoute certaines paroles de la chanson de Rod le Stud, un lien peut se faire.

 

« Partout sur la terre y’a un oragio

Mon paratonnerre c’est Horacio

On est chanceux d’avoir François Legault

Suspends tous mes droits, j’te donne le go. »

 

Je vous rappelle que le Refuge aide les jeunes en situation d’itinérance et que… tiens, tiens, cette partie de la population voit souvent ses droits être bafoués par plusieurs instances (policières et gouvernementales, entre autres). Alors « suspends tous mes droits » ne passe pas ici, selon moi. De plus, les mentions politiques claires et nettes de la chanson peuvent échauder un organisme.

 

Je comprends, « ne touchons pas à notre bon Arruda », je l’aime bien, moi aussi. J’ai été touchée de voir sa peine au point de presse. Mais la haine crachée à l’endroit du Refuge et de sa directrice est exactement la même (sinon pire, à mon avis) que celle que les internautes reprochaient aux médias et aux détracteurs du Dr Arruda. Punir la décision de la directrice en menaçant de couper les dons et de boycotter l’organisme me semble une réaction disproportionnée qui causera beaucoup plus de préjudices que les quelques commentaires dont Arruda a été la cible (et qui n’ont d’ailleurs jamais été prononcés par la directrice du Refuge).

 

Je vous quitte sur cette réflexion, je dois aller faire un don au Refuge des jeunes de Montréal. 

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