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Le malentendu comme excuse, ça ne le fait pas.
Crédit: Gemma Correll/Instagram

J’étais en 5e année. Mme Françoise nous remettait nos copies d’examen. Cet examen pour lequel j’avais oublié de répondre à toutes les questions de la dernière page. Elle m’a fait venir à son bureau pour me demander ce qui s’était passé. J’ai dû lui répondre que je ne savais pas, que je n’avais pas bien révisé, que c’était de ma faute. C’est flou.
 
Sa réponse, je vais m’en souvenir toute ma vie, par contre.
« Elizabeth, je veux te féliciter parce que tu n’as pas mis cet oubli sur la faute d’une circonstance ou d’une personne. Tu n’as pas essayé, en me donnant une quelconque excuse, de retrouver tes points. Tu as reconnu ton erreur et c’est tout à ton honneur. »
 
Du haut de mes petits 11 ans, je me souviens avoir été très surprise. Ça avait été tellement naturel pour moi de lui répondre honnêtement. À aucun moment, je n’avais pensé pouvoir faire changer ma note. J’avais oublié de faire une page, c’était de ma faute. Fin du paragraphe. Alinéa. On passe à autre chose.

(Évidemment bon, ça été la seule fois de mon parcours scolaire où j’ai oublié de faire un ou des numéros, mais ça, c’est un détail.)
 
Ce qui est véritablement important, c’est comment je me suis sentie à ce moment-là. Sans y penser une seconde, j’avais fait la bonne chose. J’étais responsable, je ne voyais pas comment je pouvais défendre la situation autrement que de cette façon.
J’ai alors compris qu’il serait, quoique parfois difficile, toujours plus payant d’avouer mes torts que d’essayer de défendre un faux point de vue ou de me placer dans la position de la victime.
 
Je suis chanceuse d’avoir croisé Mme Françoise dans ma vie.
Visiblement, tout le monde n’a pas eu une Mme Françoise sur son chemin.
Du moins, pas les adeptes de la nouvelle tendance en matière d’excuses : le malentendu.
 
Évidemment, tout n’est pas toujours noir ou blanc. Par contre, quand on se place de façon objective, des zones grises, il n’y en a pas tant que ça. Un malentendu, dixit le nouveau Petit Robert de la langue française 2007, c’est une « divergence d’interprétation entre personnes qui croyaient se comprendre ». Tandis que le malentendu devait être utilisé pour défendre des flous, on en fait désormais usage pour contredire des faits.
 
Le malentendu est comme devenu le parfait savon pour s’en laver les mains. Ce n’est pas avouer sa faute, ce n’est pas accuser l’autre, c’est juste soulever le petit doute nécessaire pour se déculpabiliser et renvoyer le tort ailleurs. Comme si ce n’était pas assez que la vraie victime soit blessée ou ait de la peine, on lui impose en plus de se remettre en question. Parce que force est d’admettre que c’est rarement la personne qui invoque le malentendu qui finit par faire l’examen de conscience.
 
Qu’on se le dise, la discrimination, l’intimidation, le racisme et le manque de respect, peu importe sa nature, ne seront jamais excusables par un malentendu. JAMAIS, OK?
 
Je vous promets de m’acheter l’édition 2018 du nouveau Petit Robert. Si, dans les 11 dernières années, la définition a changé pour « mot passe-partout qui permet d’éviter d’avouer ses fautes et qui renforce chez l’autre partie le sentiment de culpabilité de ne pas avoir compris, parce que c’est tellement pas ça que je voulais dire », je vous devrai une lettre d’excuses en bonne et due forme.
 
Entre temps, permettez-moi de persister à dire que ce serait le bon moment pour mettre nos ego de côté, pour arrêter de se victimiser et pour apprendre à s’excuser sincèrement.

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