Un p’tit side de honte avec ça? Comme si les struggles relatifs à la santé mentale n’étaient pas suffisants, il faut aussi gérer les opinions négatives quant à la gestion de celle-ci. Comment expliquer que la dépression est une maladie? Que l’anxiété n’est pas un choix? Que pour la gérer, une promenade en forêt n’est pas suffisante. Prendre soin de son dedans ne se résume pas à un bain moussant (même si c’est cool et que ça fait du bien). Advenant que ce soit suffisant pour une personne, rien ne garantit que ça le soit pour tous. Pis que c’est correct comme ça. Parce qu’on n’a pas tous les mêmes besoins. Parce que souvent, un p’tit thé emmitouflé avec son chat ne chasse pas les idées noires. Du moins pas en permanence.
Tout le yoga du monde n’aurait pas suffi à ralentir mon dedans. Mon dedans allait trop vite. Parfois, il allait si vite que j’aurais voulu presser pause. Si je ne voulais pas mourir, je voulais parfois dormir 6 mois. Pour ne plus gérer. J’échouais à prendre le dessus de mon dedans. J’avais besoin d’aide.
Je repense parfois à la gêne que j’éprouvais. Je me demandais si j’étais folle. Je le demandais aussi aux autres. Beaucoup. Je me sentais poche de poser plein de questions. J’avais peur qu’on me trouve gossante. J’y pensais. Beaucoup. Je demandais aux autres si j’étais gossante. Non. Je ne les croyais pas. Je leur disais. Je me disais que j’aurais pas dû leur dire. Je me trouvais encore plus poche. Beaucoup. Et je ne leur disais plus rien. Et je me disais des choses très poches. Beaucoup. Mon corps avait mal. Les journées étaient longues. Ma tête était pleine. Beaucoup.
Je suis une p’tite fille chanceuse. On oublie parfois nos privilèges. Être entourée d’amies qui vous supportent, c’est un méga privilège. Ça met une distance entre les discours culpabilisants et les besoins. Ça aide à oublier la honte. Ça recentre sur soi. Ça confirme qu’on n’est pas folle. La médic n’est pas une pilule magique qui règle tout. Ce n’est pas non plus le traitement adapté pour tous. Mais c’est une option à laquelle on s’attarde peu à cause des mythes qui l’entourent. Une option qui fait peur à force d’entendre qu’elle va nous faire mal. Une option dont on n’ose pas parler par crainte du jugement. Alors qu’ouvrir cette discussion avec son médecin, et avec notre entourage si on s’en sent capable et que celui-ci est adéquat, c’est une belle façon de s’écouter. Parce que dans certains cas, comme le mien, ça fait toute la différence. La différence entre me forcer pour continuer et apprécier mon quoditien.
Des fois, j’aimerais ça avoir un chandail sur lequel serait inscrit : «Allô, je m’appelle Catherine, ma santé mentale va ordinaire et je prends de la médication. Ouin pis?!? ». La honte a fait place à la confiance. Le besoin de me cacher a fait place au besoin d’apaiser les autres. Je pense aux années où je n’aurais jamais accepté de prendre des antidépresseurs animée d’une pointe de chagrin. Je ne compte pas les journées où mon anxiété a pris le dessus et m’a rendue misérable. Des années où la menace des effets secondaires m’empêchait de considérer cette option. Dans mes moments de doute (parce que oui, j’ai dû essayer diverses formules avant de trouver la bonne), je me remémore les douleurs de mon corps en guerre contre lui-même. J’ai abdiqué quand je n’en pouvais plus. Quand je n’étais plus fonctionnelle. Quand mon objectif principal de la journée était de réussir à me lever. Quand j’ai dû prendre une pause au travail avant de prendre une pause dans ma vie.
Je pense à ceux et celles qui se questionnent. Qui n’osent pas. Par peur des jugements. Le jugement des autres et leur jugement à eux. Parce qu’à force d’entendre les préjugés, on les incorpore et on les reproduit. On se les applique. On s’évalue sévèrement. On s’exige la perfection. Perfection subjective basée sur l’idée qu’un problème de santé mentale c’est wrong et qu’en prendre soin confirme sa présence en nous.
Prendre soin du monde et de soi, c’est peut-être prendre conscience de l’impact de nos préjugés.