Au début, je n’ai pas compris. Comme j’avais fini par dire « oui », je ne croyais pas que c'était une agression.
Le lendemain matin, je me sentais quand même mal à l’aise. Honteuse. La veille, en arrivant au bar, je m’étais juré de ne pas coucher avec Lui, l'ex, mais j’avais beaucoup bu. J’ai cédé. Je n’avais pas su tenir mon bout jusqu’au bout.
J’étais une slut, une fille qui couche dès qu’un gars lui donne de l’attention, une fille qui ne se respecte pas. C’est ça que j’ai pensé au début longtemps.
J’ai voulu Le revoir. Passer une soirée avec Lui pour me prouver que je pouvais résister. Je me mettais ainsi au défi. Je n’avais pas encore compris que ce n’était pas moi le problème. J’ai résisté ce soir-là.
Puis, il y a eu le phénomène #AgressionNonDénoncée. Je me suis questionnée : m’avait-on déjà agressée? Non, bien sûr que non! J’avais toujours fini par dire oui, j’avais toujours fini par donner mon consentement. Ça me dégoûte maintenant que j’y pense, comment je pouvais me contenter et me satisfaire d’un « finir par dire oui ».
Je ne sais pas comment s’est fait le déclic, mais j’ai su : il avait profité de moi. J’avais dit : « Non, je ne veux pas prendre ta main. Non, je ne veux pas t’embrasser. Non, pas même un seul baiser. Non, je ne veux pas me déshabiller. » Comment un seul oui, arraché de peine et de misère de ma bouche empâtée par l’alcool, avait pu étouffer tous mes « non » répétés et répétés?
Malgré mon éducation et ma conscience féministes, j’ai commis la plus grossière erreur : j’ai accusé la victime de l’agression. J’ai accusé la fille qui porte des petits shorts l’été, la fille qui boit jusqu’à la fermeture des bars. J’ai accusé la fille qui a dit non. J’ai cru que c’était ma faute.
J’ai confronté mon agresseur presque un an plus tard. Ses réponses, ses explications ne m’ont pas satisfaite. Ses gestes ne sont pas justifiables, voilà tout. En même temps, je m’en fous un peu, de ses excuses. J’ai dénoncé, j’ai confronté; je suis fière de moi. J’ai un poids de moins sur les épaules : je n’ai plus honte, je ne me sens plus fautive. Un seul oui ne vaudra jamais mille fois non.