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Dis Son Nom: quels recours y-a-t ‘il pour les survivant.e.s?
Crédit: Melodie Descoubes/Unsplash

L’été dernier, une deuxième vague du mouvement #MeToo sur les réseaux sociaux a poussé deux personnes à créer une liste dans laquelle les survivant.e.s d’agression sexuelle et d’abus avaient la possibilité de dénoncer leurs agresseur.e.s de façon anonyme. 

L’idée est née d’un besoin criant des survivant.e.s de partager leurs expériences et de se faire comprendre sans risquer de banaliser leur vécu. C’est d’ailleurs une approche d’intervention souvent utilisée dans les centres d’aide aux victimes de violences sexuelles puisqu’elle est favorable au processus de guérison.

Comme il fallait s’y attendre, la page Dis Son Nom et les innombrables dénonciations s’y trouvant ont semé une grande controverse, particulièrement quand les grands médias s’en sont mêlés. On a pu lire à coup de pelleté de « c’est une vraie chasse aux sorcières » jusqu’à des « innocent jusqu’à la preuve du contraire » et des « il faut passer par le système de justice au lieu de la place publique ».

Justement, en parlant du système de justice…

Au début de la semaine dernière, il a été jugé que les administratrices de Dis Son Nom seront forcées de révéler leur identité suite à une poursuite judiciaire les visant de la part d’une personne nommée dans la liste. À la demande de cette dernière, les survivant.e.s l’ayant dénoncé devront potentiellement aussi sortir de l’anonymat.

Mais voyez-vous, forcer une personne a confronté son agresseur.e., c’est la contraindre à une position vulnérable et assujettie à d’autres violences. Aucune victime ne devrait vivre ça, même si ça vient d’un jugement de la Cour Supérieure.

Quand on y pense, c’est un verdict qui reflète franchement bien le peu de considération qu’on porte aux victimes de violences sexuelles.

En effet, le système de justice est loin d’être adapté aux cas d’agression sexuelle. Les procédures judiciaires forcent les victimes à revivre leur agression sans relâche et à faire face à la constante mise en doute de leur expérience. Se battre pour prouver l’existence seule de son viol à des conséquences psychologiques plus qu’écrasantes.

Comme si ce n’était pas assez traumatisant, les agresseur.e.s sont aussi très rarement reconnu.e.s coupables. On ne peut que se souvenir douloureusement des acquittements de Rozon, Salvail et Lapointe, tous innocentés alors qu’il y a une quantité très raisonnable de témoignages manifestant leurs comportements violents.

À partir de là, on fait quoi? On reste en silence et on subit ?

J’ai l’impression que partout où on se tourne, les personnes qui paient le gros prix pour les agressions sexuelles sont les victimes. Si elles se taisent, elles vivent dans la honte et la culpabilité. Si elles prennent la décision, ma foi courageuse, de faire face à leur agresseur.e, elles se mettent en danger. Si elles passent par les procédures judiciaires, elles en ressortent avec plus de séquelles qu’elles en avaient au départ.

Si elles dénoncent anonymement dans une tentative d’en sauver d’autres, elles courent maintenant le risque d’être forcées de se dévoiler.

Est-ce qu’une liste de noms d’agresseur.e.s potentiel.le.s en ligne est le meilleur moyen de résoudre les enjeux autour des violences sexuelles? Je ne crois pas, non. Sauf qu’on en serait certainement pas là s’il y avait eu d’autres alternatives accessibles et sécuritaires pour les survivant.e.s. Après tout, le dernier recours est rarement l’option idéale; mais il est parfois nécessaire au changement.

Si vous êtes un.e survivant.e de violences sexuelles et que vous ressentez le besoin d’en parler, voici quelques ressources disponibles pour vous:

1-888-933-9007
SOS Violence conjugale
1-800-363-9010
Montréal, QC H1W 3Z3
514-251-0323

 

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