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La vie adulte et la malédiction de ne plus dire assez « Je t’aime »
Crédit: Pexels

Je me souviens, quand j’étais au primaire, je pliais toujours mes lettres cinquante-douze fois et, quand je signais, je n’oubliais jamais d’écrire « je t’aime fort, XXX amicaux » (c’était bien important de qualifier mes becs parce qu’il ne fallait surtout pas prendre ma missive relatant ma fin de semaine wild de jeune fille de 8 ans pour une déclaration amoureuse, t’sais). Je ne me posais pas plus de questions : ce sont mes amis, je les aime, je leur dis. Chaque fois. Pour ne pas qu’ils oublient.

La tradition s’est poursuivie au secondaire, avec des messages méga-scrapbookés, qu’on se donnait principalement lors d’événements, ou lors de nos échanges sur MSN, où j’avais approximativement un million d’emojis maison qui galvaudaient tous d’une manière un peu plus créative que l’autre l’orthographe de « je t’aime » pour le transformer en une abomination du style « ch’t’m 4 4 4 ». #RIPmsn

Je pense que c’est probablement quelque part vers la fin du secondaire ou au début du Cégep que je suis devenue plus modérée dans mes déclarations d’affection. Je changeais de milieu, j’avais une nouvelle gang. On se disait soit « je t’aime » publiquement de manière exagérée (je pense que l’exagération c’était le nouveau « XXX amicaux » des années 2010), soit pas du tout.

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J’ai pourtant aimé des personnes à cette époque-là aussi, même chose pour les rencontres lors de mon passage à l’université, mais à part à quelques exceptions,  je ne me souviens pas de leur avoir exprimé sérieusement mon appréciation. Je l’ai fait par d’autres manières détournées, mais de prendre le temps de mettre des mots sur notre relation, sans qu’il n’y ait une occasion ou une carte à signer? Je ne pense pas.

L’autre jour, j’écrivais à une de mes amies qui ne feelait pas trop pour lui remonter le moral et, au milieu d’un flot de petits textes sérieux, je lui ai rappelé que je l’aimais. Pas un euphémisme, comme « je t’apprécie beaucoup », mais vraiment un « je t’aime » en bonne et due forme. En l’envoyant, j’ai eu un petit choc, parce que je ne me souvenais pas la dernière fois que j’avais écrit ça straight pipe, sincèrement, à une autre personne que mon amoureux ou des membres de ma famille.

En fait, je ne pense pas avoir dit un vrai « je t’aime » dans la dernière année à cinq de mes amis. C’est vraiment un triste bilan. La COVID a le dos large, mais pour une fois, ce n’est pas sa faute. Recule d’une année de plus, mon ratio n’est probablement pas plus élevé. Pourtant, je suis entourée de tellement de personnes exceptionnelles de qui je peux dire sans l’ombre d’un doute que je les aime sincèrement. Je le sais qu’ils le savent, mais est-ce que ça suffit vraiment?

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Pis on dirait que moins tu le dis, moins c’est facile de le faire. Ça devient une espèce d’happening, trois petits mots que tu écris dans Messenger et que tu effaces en te disant que tu vas avoir l’air probablement too much d’envoyer ça. Pourtant, je ne pense pas que ça puisse être too much. Ou du moins, ça ne devrait pas l’être.

Bref, le temps des Fêtes en mode pandémie m’a permis de faire cette petite réflexion et me donne envie de starter plus tôt mes résolutions de l’année prochaine en commençant dès maintenant à dire aux personnes qui me sont chères que je les aime. Pis pas juste un peu en blague, après avoir reçu un vidéo super drôle pour me remonter le moral dans une journée où ça feel pas trop. Sincèrement. Pis souvent, aussi. Assez pour que, à la longue, il n’y en ait plus de tabou. Ni pour elles, ni pour moi.

Je ne pense pas qu’on puisse trop spread the love dans le contexte actuel, de toute façon. C’est tellement nécessaire de rappeler aux gens qu’ils sont importants pour nous et je ne connais absolument personne qui, depuis mars, n’aurait pas pu utiliser, à un moment où un autre, un « je t’aime » sincère pour mettre un peu de doux dans sa journée.

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