C’est tout juste à la fin de mon secondaire que j’ai rencontré cet ami de façon vraiment banale. Un ami d’amis avec qui je me suis découvert quelques intérêts communs. En apprenant à le connaître, j’ai fini par être très touchée par sa vulnérabilité. J’étais loin de me douter que cela me nuirait un jour.
Cet ami n’a pas tardé de me faire savoir qu’il s’imaginait être en couple avec moi, alors que l’on se connaissait depuis peu de temps. Je n’ai pas vraiment su comment réagir sur le coup tellement son speech était enflammé. Le « non » n’est pas sorti tout de suite, car j’avais le pressentiment que quelque chose de terrible se produirait si jamais je le disais. Je n’étais alors pas capable d’expliquer pourquoi. Je crois qu’en fin de compte, j’avais peur de lui donner encore plus de détresse, et je ne savais pas comment gérer cela. Je tentais malgré tout de lui faire comprendre que ce n’était pas réciproque de mon côté, mais pour lui, le refus ne semblait pas être une option valide.
Il avait trouvé en moi la confidente no. 1. Me parlait de ses déceptions amoureuses, de son sentiment d’incompréhension. Puis, il m’a parlé des femmes qui ne lui avaient jamais donné sa chance, des femmes qui ne savent pas ce qu’elles veulent, des femmes qui s’amusent à faire souffrir, des femmes-agaces. Son discours était toujours le même: c’était la faute des femmes, mais pour lui j’étais « différente » de celles qu’il avait connues.
J’ai malgré tout vécu mes choses de mon côté et j’ai commencé à sortir avec un autre gars. Il l’a su et m’a fait part de son immense détresse, du fait que j’aurais dû le prévenir, que ça lui avait donné le goût de se suicider* et qu’il allait certainement le faire. Je ne savais pas comment me placer en entendant ses mots. Je me sentais coupable et pleine de honte. Il me disait que je lui avais donné de faux espoirs. Je sentais que je devais me rattraper pour le mal que je lui avais fait.
Peu de temps après, il est sorti avec une de mes amies. Ça s’est mal passé et ça a mal fini, le confortant encore plus dans ses pensées dévalorisantes sur les femmes.
C’est un événement anodin sans aucun rapport avec cette histoire-là qui m’a fait sonner une cloche, ou plutôt une sonnerie d’alarme. Un soir où nous nous étions rencontrés chez moi, il s’est amusé à cracher dans le jardin de mes parents. Je m’étais fâchée et lui ai fait savoir que c’était impoli. D’après lui, j’exagérais énormément.
Après ce petit événement qui me paraissait sans profondeur, il a parti une véritable campagne de salissage à mon nom auprès de nos amis communs, déclarant que j’étais une « conne frustrée » et que si je ne m’excusais pas, il ne me parlerait plus jamais. Je l’ai évité pendant plusieurs semaines jusqu’à ce que la vapeur retombe de son côté et que les choses redeviennent comme avant. Sa détresse au quotidien était pour moi une excuse suffisante pour l’accepter à nouveau dans ma vie, d’autant plus que je me disais que j’avais certainement exagéré pour l’histoire du jardin.
Les choses sont plus ou moins redevenues comme avant pendant quelques mois, mais la goutte a fait déborder le vase quand, pour une raison que j’ignore, il a recommencé à dire des choses contre moi dans mon dos. À partir de là, j’ai cessé d’accepter de telles choses de sa part et j’ai choisi de me protéger. Il a essayé de me parler à de nombreuses reprises, mais je ne tolérais plus ce qu’il me faisait. J’ai compris qu’il utilisait un chantage affectif pour accéder à ce qu’il voulait, sans considérer mes propres besoins.
Depuis, il m’est arrivé parfois de faire face à de fortes réactions après avoir dit « non ». À bien des reprises, j’ai ressenti de fortes pressions pour changer d’avis. Dès que l’on ressent un malaise, il est important de ne pas s’invalider et de ne pas céder aux envies de l’autre. Si nous devons répéter plusieurs fois nos attentes envers une relation ou que l’on commence à se résigner sous la contrainte, c’est peut-être parce que l’on est à un point où ça ne sert à rien de parler et qu’il est préférable de s’éloigner.