Avec une vague de dénonciations, j’ai toujours peur du backlash qui s’ensuit. Les journalistes donnent leurs opinions sur la manière dont les accusations ont été faites, sur les allégations en soi, sur les personnes impliquées, sur les actes commis. Comme pour le mouvement #MeToo, il y a encore bien des hommes qui vont crier à l’injustice. Comme résultat des amalgames boiteux et d’arguments qui ne tiennent pas la route, on entendra alors dans les médias, sur les réseaux sociaux, dans les barbecues entre amis; « On peut plus rien dire! » ou encore, « Mais comment on est supposés cruiser d’abord? »
C’est spécial quand même à quel point la liberté d’expression pour certains, c’est de tenir des propos problématiques ou violents, ou encore que leur « cruise » est encrée dans des comportements qui rendent mal à l’aise ou qui peuvent même traumatiser la personne qui les reçoit.
Je sens que la vapeur tourne un peu, on commence à croire les victimes, on demande aux agresseurs de réfléchir deux secondes et de se poser des questions, s’éduquer et faire du travail sur soi, d’être moins toxique ou violent. Un changement d’attitudes et de comportements peut faire toute la différence. Il s’agit de comprendre les rudiments du consentement, de se mettre à la place de l’autre, de faire preuve de compassion.
Plus clairement encore, c’est de minimalement être à l’affût des réactions de l’autre personne, et si ces réactions ne sont pas claires, de lui poser la question pour clarifier le tout. Pour ceux qui diront « On peut jamais se laisser aller! Faudra toujours se surveiller! »… Quelle ironie, si vous saviez. Voici donc une liste des mesures que je prends continuellement pour ne pas subir de violence sexuelle, et je suis persuadée que la majorité des femmes utilisent une ou plusieurs mesures semblables. Slate.fr a d’ailleurs publié un article très intéressant sur le sujet il y a quelques années en interrogeant six femmes sur leurs stratégies pour éviter les agressions sexuelles.
Pour l’exercice à extérieur (pour éviter le harcèlement)
Ne pas courir en top de sport (même s’il fait 40 degrés, même si les hommes sont en chest).
Ne pas courir après le coucher du soleil.
Regarder devant moi, rester à l’affût de ce qui se passe autour de moi.
Pour aller en date (parce que le date rape existe)
Connaître le profil de la personne (prénom, nom, âge, profession).
Ne jamais partir de chez moi sans que mon téléphone ne soit chargé.
Ne jamais sortir de chez moi sans mon téléphone.
Proposer un endroit public, préférablement un que je connais déjà.
Avertir mes colocataires de ce que je fais, avec qui et où.
S’il m’invite chez lui ensuite, texter l’adresse à mes colocataires.
Quand je dois me déplacer tard le soir (pour éviter les comportements creepy)
En bus, rester à l’avant près du chauffeur.
En métro, aller dans le wagon où il y a plusieurs personnes, plusieurs femmes.
En Uber, indiquer une adresse voisine à la mienne plutôt que mon adresse précise.
Vérifier si la plaque d’immatriculation de la voiture est bien celle indiquée dans mon appli avant d’entrer dans la voiture.
Ne pas m’endormir en chemin.
À pied, marcher vite en regardant autour de moi, choisir les rues les plus éclairées, parler au téléphone ou faire semblant.
Quand je sors entre amies (parce qu’on connaît toutes une personne à qui c’est arrivé)
Traîner mon verre aux toilettes.
Terminer le verre avant d’aller dehors, en commander un autre seulement à mon retour.
Partir en même temps que mes amies, même si je m’amuse encore et que je voudrais rester.
Sous-thème du « party de maison » : idem des points ci-dessus, puis espérer que mes amis et leurs amis ont assez d’allure pour ne pas me violer.
Et malgré toutes ces prescriptions, il m’est arrivé de subir des violences sexuelles. Parce que malgré toutes les précautions qu’on prend, les agressions sexuelles ne sont causées par nul.le autre que les agresseurs.
Je me demande : à quand la liste des comportements à adopter pour ne pas agresser ?