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Introverties ou extraverties : comment vit-on l’isolement du COVID-19?
Crédit: Pexels

Dès vendredi dernier, alors que les cas de COVID-19 se multipliaient dans le monde (mais je ne vous apprends rien, n’est-ce pas?) et que des mesures exceptionnelles étaient sur le point d’être mises en place pour éviter au maximum la propagation du virus au Québec, on nous annonçait que notre travail se ferait à distance pour une période indéterminée. Si tout le monde était plutôt soulagé de cette décision, c’est en discutant avec ma collègue Alexandra que j’ai réalisé à quel point nous vivions la situation actuelle différemment.

Il faut comprendre que je suis très introvertie avec une capacité à être sociale lorsqu’il le faut alors que de son côté, ma collègue est plutôt extravertie avec un petit jardin secret quand même. Sur le continuum entre introversion et extraversion, nous nous retrouvons donc pas mal près des deux extrémités. Ça donne une situation un peu drôle où Alexandra me dit qu’elle commence à crave des interactions sociales dans la vraie vie et que je réponds « je pense que je n’ai jamais ressenti ça ». Oups.

Bref, tout ça pour dire que mon hypothèse, c’est que les personnes introverties et les extraverties vivent la période d’isolement actuelle bien différemment et j’ai consulté la communauté des collaboratrices pour mettre mon idée à l’épreuve. Ce n’est peut-être pas l’étude la plus représentative de l’univers, mais voici ce que ça donne.

 

Le télétravail, pas l’idéal pour tout le monde…

C’est sans grande surprise que je constate que les personnes qui s’identifient comme étant introverties ont tendance à apprécier le télétravail davantage que les extraverties. Malgré tout, parce qu’il le faut, tout le monde semble à même de s’y adapter, avec plus ou moins de facilité.

Pour Audrey, il n’y a aucun changement dans sa routine actuelle: « Je suis travailleuse autonome donc pour moi, quarantaine ou pas, j’ai l’habitude de travailler à l’intérieur ou d’où je veux. » Pour d’autres, plus introverties, comme Andrée-Anne (et moi, je l’avoue), cette situation provoque quelques constats: « J’aimerais pouvoir toujours travailler comme ça! Je suis plus concentrée, je m’entoure de doux, et je travaille très bien de la maison. »

De son côté, Noémie est plutôt extravertie, mais s’adapte plutôt bien à la situation: « Je suis en télétravail pour mon stage (qui est de 3 jours par semaine). Ça se passe bien puisque mon employeur est déjà dans le domaine des TI, on est bien équipés côté logistique, disons. J’appelle ma superviseure trois fois par jour et toutes les deux, on n’aime pas tant travailler de la maison, mais on s’y fait. »

Pour Jany, qui se qualifie de « fausse extravertie, bien équipée pour des situations sociales, sans que ça paraisse que ça gruge relativement toute son énergie », elle y voit une certaine opportunité d’explorer de nouvelles manières de faire en entreprise: « Si l’expérience [de télétravail] se passe bien pour mon département, j’aimerais aussi rendre ça plus accessible après la crise. »

 

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Les ami.e.s et la vie sociale, là-dedans?

Mais dans le contexte actuel, il n’y a pas que nos méthodes de travail qui soient affectées; nos contacts avec nos ami.e.s et nos proches aussi!

Pour celles comme Alexandra qui sont plus du côté des extraverties, il faut pallier à ce manque d’interactions et trouver des solutions concrètes; c’est donc ce qu’elle a fait: « Je me suis prévu des rendez-vous FaceTime avec mes amies. Par exemple, ce week-end, mon amie et moi allons nous commander des sushis chacune de notre bord et s’appeler via FaceTime pour les manger en jasant, comme si on allait au resto ensemble! »

Pour d’autres plus introverties, comme Jany, pas besoin d’aller aussi loin en termes de créativité pour rester connectée: « Tant que j’ai mes animaux avec qui échanger et que je peux communiquer avec le monde extérieur via la technologie (PAS par téléphone), je n’ai aucun problème. J’ai même le contraire d’une problème. »

Évidemment, tout n’est pas blanc ou noir et même les personnes introverties peuvent s’ennuyer de leur vie sociale habituelle, même si elle est peut-être moins luxuriante que celle de leurs pairs extravertis. C’est le cas de Jade: « Est-ce que ma vie sociale me manque? Malgré tout, oui, parce que je vois quand même du monde en général – ma mère, quelques amis – même si je suis plus introvertie et, en ce moment, je ne peux pas vraiment les voir. Je parle donc beaucoup avec eux par Facebook ou par téléphone. »

La situation d’isolation actuelle semble quand même être un peu plus difficile pour l’extravertie Noémie: « La vie universitaire me manque énormément; de me promener dans l’école et croiser des ami.e.s à droite et à gauche, de commencer des discussions sur tout et rien. Ce n’est vraiment pas facile de me retrouver seule toute la journée. »

Pour Isabelle, la routine et la vie normale continuent: « Je suis très introvertie. Personnellement je me sens relativement bien avec le fait de ne pas voir beaucoup de monde, même pendant une longue période. C’est au point où je ne remarque pas beaucoup de changement de mon côté même avec l’isolement! Je le tolère donc très bien. Je m’occupe en terminant mes travaux universitaires, en faisant du ménage et en cuisinant. Savoir aussi que je peux sortir sans me préoccuper du nombre de personnes à l’extérieur est aussi un soulagement pour moi. Comme personne ayant le syndrome d’Asperger, ça fait une pause au cerveau et moins d’informations à traiter quand je sors à l’extérieur faire mon épicerie! »

 

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On s’inquiète ou non?

L’inquiétude est palpable pour tout le monde; qu’on soit introverties ou extraverties. Et c’est normal, je crois, puisqu’on vit présentement une période de grande incertitude et qu’on n’a qu’un contrôle très limité sur la situation (en évitant au maximum nos déplacements, en aidant de manière sécuritaire les autres, en partageant les ressources plutôt qu’en les accumulant pour soi, etc.).

Mais lorsque quelqu’un qu’on aime travaille fort aux premières lignes pour limiter l’impact de la situation au Québec, c’est certain que ça provoque un certain stress, comme c’est le cas pour Jacynthe: « Je me fais du souci pour mon amoureux qui travaille, car il est un employé des services d’urgence de Montréal. Je suis anxieuse 24h sur 24 tous les jours, car je me sens impuissante. Mais bon, je gère et j’essaie de me reposer le plus possible. Je crois qu’être introvertie me confère une (trop) grande capacité de réflexion et d’introspection et que je pense à tout dans les moindres détails, et évidemment, ça cause du stress. »

Aussi, vu l’évolution rapide de la situation, d’autres comme Noémie, sont forcées de revoir leurs plans: « J’avais prévu une soirée jeux de société chez nous cette semaine, mais je pense devoir l’annuler. Je ne suis vraiment pas certaine. J’ai peur de la contamination, mais côté santé mentale, j’aurais besoin de voir ma gang. Je viens de passer ma pause de dîner à pleurer parce que je suis déchirée entre le besoin de voir mes ami.e.s et mon inquiétude face au virus. Je ne veux pas risquer sa transmission dans ma gang. »

Et pour les personnes qui n’ont pas le choix de se déplacer pour travailler, cela peut aussi être anxiogène. C’est le cas pour Jade: « À la seconde où je pars travailler, j’ai comme une mini anxiété à me demander si je risque quoi que ce soit ou même si je risque de mettre quelqu’un en danger. En plus, mon copain est asthmatique. Ça me stresse parce que je ne veux pas qu’il attrape ça… »

En plus du côté humain de la situation, Jade s’inquiète aussi pour l’économie qui risque de souffrir et d’affecter bien des travailleurs et des travailleuses: « Je suis plutôt anxieuse et je me pose tout plein de questions. Et je me demande surtout comment ça va se passer au niveau économique, parce que c’est vraiment en train de tomber bas. »

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Comment vivez-vous les mesures d’isolement mises en place actuellement? Avez-vous espoir que la situation se rétablira rapidement?

 

Évidemment, ce texte est à prendre à la légère. Il y a des problèmes bien plus graves que notre petite perte de confort en cette période d’isolement et de distanciation sociale (une pandémie de COVID-19, par exemple). Mais on croit que c’est important de parler de santé mentale et de permettre aux personnes d’exprimer ce qu’elles ressentent pour que d’autres se sentent peut-être moins seul.e.s, aussi. Ce texte se veut donc un début de conversation, tout simplement.

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