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Quand on se sent comme une perle pas si rare que ça
Crédit: Unsplash

Ces temps-ci j’écoute beaucoup la chanson Rare de Selena Gomez. Normalement, je ne suis pas trop attirée par sa musique, mais ses paroles m’ont tout de suite accrochée, particulièrement sa ligne aussi banale que percutante « To tell me I’m rare, to make me feel rare ».

Sur le coup, sans trop y réfléchir, j’ai envoyé les paroles de la chanson à mon lover (accompagnées de la vidéo de Selena Gomez pour qu’il vive une immersion intégrale dans l’univers de la chanteuse). Et puis, nous avons discuté de ce que Gomez tentait de mettre de l’avant : une insatisfaction marquée face à son partenaire qui, visiblement, la néglige en attention et en amour. En d’autres mots, « donner et recevoir peu » résume bien le mood de la chanson.

Gomez ne nomme pas quelque chose de nouveau. Au contraire, le succès de ce texte accrocheur réside dans le fait que ce phénomène, loin d’être rare, décrit une situation dans laquelle plusieurs femmes se reconnaîtront.

Pourquoi étais-je aussi interpellée par ces quelques mots aussi tristes que clichés? Pourquoi, presque tout de suite, ai-je pris la peine de l’envoyer à plusieurs de mes amies en me disant qu’elles s’y reconnaîtraient, elles aussi? Pourquoi tant de personnes – et d’hommes en particulier – ne font-ils pas sentir à leurs perles rares qu’elles sont rares?

Je me demande : combien de fois entendez-vous des femmes de votre entourage répéter qu’elles se sentent « prises pour acquises », « pas désirées », « pas satisfaisantes », « pas assez belles », « pas confiantes », « pas prises en considération » par leur partenaire? Moi, je l’entends très souvent.

Ça me pousse à réfléchir: est-ce que tout ça aurait quelque chose à voir avec l’éducation de nos garçons, avec la manière dont ils développent par la suite leur rapport aux femmes? Qu’est-ce qui entraîne le développement de ces comportements qui feront un jour souffrir la personne qui partagera leur vie et qui la feront sentir pas si aimée que ça?

La semaine ou je développais une certaine obsession pour la chanson de Selena Gomez, La Presse publiait un article signé par Martine Delvaux intitulé Il faut aimer les femmes.

Encore une fois, je me suis empressée – après avoir un peu pleuré en lisant l’article à cause de la force avec laquelle l’auteure décriait une situation pourtant si fragilisante – d’envoyer le texte aux femmes que j’aime pour qu’elles puissent s’identifier à ces sages paroles. J’ai reçu plusieurs remerciements ainsi que la confirmation que les mots de Martine Delvaux validaient les sentiments de plusieurs femmes de mon entourage.

Dans son article, Delvaux décrit les grands paradoxes de notre société face aux impératifs féminins, aux rapports inégaux entre les sexes, et plus précisément : d’un amour toujours conditionnel que nous entretenons face aux femmes.

Les femmes sont toujours « trop » ou « pas assez ». Trop « refaites » ou pas assez arrangées, trop prudes ou trop salopes, pas assez calmes ou pas assez assumées, trop séductrices ou trop frigides, etc. Delvaux termine son article avec une citation particulièrement parlante: « Depuis des siècles, des femmes sont féministes non pas par haine, non pas dans le but de dominer une moitié de l’humanité, mais par amour. Le désir féministe n’a pas à voir avec un renversement des forces. Il n’a pas non plus à voir avec votre effacement. Le geste féministe n’est pas une vengeance. C’est quelque chose, plutôt, comme une caresse, cette main qu’on approche de l’autre pour toucher sans vouloir posséder, s’approprier, blesser. Une main qu’on tend, une main qu’on pose, une main qui reste là, patiente, aimante. Le féminisme a à voir avec le désir d’exister, tout simplement. Avec vous. Pour la suite du monde. »

Cette citation me force à me demander; faut-il que notre féminisme s’exprime avec une attitude « maternelle » – douce, caring – pour qu’il soit acceptable aux yeux des hommes? Demande-t-on aux femmes de prendre leur place… sans toutefois prendre trop de place?

 

Pour conclure…

Au final, j’ai l’impression que Selena Gomez et Martine Delvaux évoquent un même enjeu: l’amour que la société porte aux femmes est-il suffisant? Est-il adéquat? Cet amour reconnaît-il leur juste valeur? Nous sommes plusieurs à croire que la réponse à cette question est malheureusement non.

De son côté, Selena exprime son besoin d’amour doucement, candidement, avec tendresse. Elle revendique, doucement sur un air enchanteur et séducteur, son besoin d’être reconnue dans sa rareté. Les femmes doivent-elles revendiquer tout en rassurant les hommes qui prétendent les aimer?

À quand une société où les femmes se sentiront aimées, désirées, acceptées et satisfaisantes? J’aimerais que les femmes prennent leur place, qu’elles osent, se trompent parfois et aient droit à l’erreur. Je voudrais qu’elles trouvent des relations amoureuses dans lesquelles elles se sentiront épanouies, indépendantes et reconnues à leur juste valeur.

Chaque femme est forte, est « assez » et mérite un.e partenaire qui lui fera savoir chaque jour qu’elle est une véritable perle rare.

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