Avec la période des Fêtes et des repas festifs variés, je vous annonce l’ouverture tant attendue de la saison intensive des commentaires dont on se passerait!
« Tu en reprends?! »
« Tu manges pas plus que ça?! »
« Où tu mets tout ça?! »
« Voyons, lâche ton régime, gâte-toi dont! »
Et toutes les variantes succulentes…
« Ishhh, ça c’est gras/sucré/engraissant! »
« Ben voyons, juste un p’tit morceau! »
« Va falloir tu t’entraînes fort pour brûler tout ça…! »
« Quoi! Un si gros morceau que ça?! »
« Ah ouin, tu manges ça toi, même si tu fais attention?! »
Les possibilités de commentaires alimentaires sont infinies, mais elles ont toutes un point commun : leur lourdeur.
La pression de la personne visiblement en mode privation qui bave en commentant « vice » dans mon assiette, de celle qui me harcèle d’en reprendre pour ne pas se sentir coupable de se resservir elle-même ou encore de celle qui a trop à cœur « mon bien »… Si on a une relation moindrement délicate avec la nourriture, notre corps ou notre appétit, ben voilà, ça pèse.
Et puis, on sait bien que les seuls qui échappent aux jugements (mais pas aux commentaires), ce sont les grands humains minces… EUX, ils sont encouragés à manger comme des ogres! Leur état de santé interne, ça passe comme dans du beurre (lolzzz). Les dodus? Faut oublier ça. Avoir la paix de manger ce qui leur tente, c’est perdu d’avance. Parce qu’on sait bien, forcément, s’ils étaient en forme, ils seraient sveltes comme tout : im-po-ssi-ble d’avoir une bonne santé globale ET des bourrelets. La minceur, c’est LA SANTÉ! (sujet chaud qui se discute à merveille entre deux services de tourtière extra ketchup aux fruits avec matante Gisèle qui veut maigrir depuis 1992).
Et forcément, être témoin des projets d’assiette(s) de quelqu’un, ça vient avec un genre d’obligation morale d’intervenir verbalement. Vas-y, amigo, donne-moi ton avis sur ma montagne de salade, si ça te fait feeler cheap de ne pas manger la précieuse portion de légumes recommandée. Vas-y, parle-moi de mes 542 portions de dessert. C’est utile pour nous deux et ça ne risque SURTOUT PAS de me faire culpabiliser, regretter, penser à compenser et jeûner demain.
Bon, souvent, c’est pour faire la conversation ou taquiner #mercimaisnonmerci. Et pour bien des gens, ces paroles peuvent rester sans trop de conséquences. Mais on ne sait pas ce qui se passe entre une personne et son assiette. On ne sait pas ce qui peut germer chez l’autre.
D’autres fois, ça peut ressembler à de la projection : un genre de besoin de commenter les assiettes d’une personne qui reprend du dessert parce que moi, j’ai présentement des enjeux d’image corporelle ou de relation avec la nourriture. Mais cette personne devrait pourtant s’abstenir de commenter mon absence de dessert ou, au contraire, ma 6e portion causée par un bordel de tornades intérieures intolérables qu’elle ignore.
Petit rappel : en cette saison des commentaires, j’ai le droit de REFUSER un commentaire. J’ai le droit de sourire gentiment et de dire que la police est vacances. De dire que c’est très bon, merci beaucoup, sans justifier quoi que ce soit. J’ai aussi le droit de ne rien répondre pantoute à matante Gisèle. Et le droit d’aller drette me chercher un autre morceau de dessert et de me le sacrer dans la bouche d’un seul coup en la fixant droit dans les yeux sans rien dire.
Ma recommandation? Mangeons les commentateurs. Et n’en soyons pas. Y’a assez de sujets de conversation dans la vie pour choisir autre chose que ça. Faire preuve de sensibilité à l’égard de nos voisins de table, c’est une idée appétissante, non?