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Je ne suis pas accomplie

Auteur: Catherine Fortier
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Je ne suis pas accomplie
Crédit: Unsplash
Dans un peu moins d’un mois, j’aurai 25 ans. Le fameux quart de siècle. J’ai toujours eu l’air beaucoup plus jeune que mon âge. Pendant longtemps, j’ai détesté qu’on me rajeunisse de la sorte. Je voulais être prise au sérieux. Être considérée comme une adulte. Pourtant, aujourd’hui, j’ai envie de faire semblant. Semblant que je ne suis pas une adulte. Qu’il est normal que je ne sois pas encore placée dans ma vie. Que je n’aie pas encore terminé mes études, et que je cherche encore. Normal que j’ai dû retourner vivre chez ma mère par manque de revenus. Normal que je n’aie encore jamais pu avoir de relations stables. Parce que je suis jeune, et que j’ai encore le temps.

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C’est toujours le cas, j’imagine. J’ai du temps devant moi. Mais la société ne s’attend pas à ce qu’on demeure des adolescents jusqu’à la mi-vingtaine. Et il faut dire que je suis jalouse. Jalouse des gens qui ont su se trouver, trouver la place qu’ils voulaient occuper pour le reste de leur vie. Moi, je n’y arrive pas. J’ai des rêves, des choses que je souhaite être en mesure de faire, mais je ne suis pas certaine d’y arriver un jour. Je souhaite ardemment terminer mon bacc. en psychologie, que mes troubles anxieux m’ont forcée à interrompre pendant plus d’un an. Je souhaite ardemment être admise au doctorat et étudier le domaine qui me passionne. Faire ma place dans le milieu universitaire. Avoir un vrai travail, une maison, et toutes ces choses qu’on se doit d’obtenir dans la vie.

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Je ne peux même pas faire partie des femmes qu’on harcèle concernant l’enfantement, je suis si peu établie dans ma vie qu’il n’y a aucune chance que j’aie un enfant dans un avenir proche. J’ai de la chance de ce point de vue, j’imagine. Mais en même temps, j’ai l’impression d’être encore plus problématique. Évidemment, je n’ai pas envie qu’on me mette de la pression à savoir si j’aurai des enfants bientôt, et je trouve extrêmement déplacé qu’on puisse le faire à certaines femmes. Mais je ne peux pas m’empêcher de penser que ça signifie que je suis indéniablement en retard sur les autres.
J’espère un jour être en mesure de rattraper mon retard. De trouver ma place. D’être en mesure de faire les choses comme il faut. D’être ce que la société attend de moi. Mais je n’arrive pas à savoir si je désire en raison de la pression sociale, ou si c’est réellement ce à quoi j’aspire.

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Et aujourd’hui, je me questionne. Je me demande ce que je veux. Je me demande ce que la société m’a appris à vouloir. J’essaie de différencier les deux. J’essaie de ne pas me mettre trop de pression, d’accepter de me donner le temps. Le temps de devenir une adulte. Une vraie. Le temps d’accomplir ce que je désire. Mais pour l’éternelle anxieuse que je suis, c’est difficile. Un combat de tous les jours. Pour éviter de me rabaisser, et de tout laisser tomber. Je sais que je ne suis pas la seule dans cette situation. Et ça me fait du bien de me dire qu’en fait, je suis normale.

Et, en fin de compte, je sais bien que même si j’avais terminé mes études comme je l’aurais souhaité, même si j’avais ma maison, ou une relation stable, je sentirais encore la pression de la société à accomplir autre chose. Trouver un emploi stable, procréer, procréer encore… En fait, la seule chose à faire (plus facile à dire qu’à faire!) est de tenter de ne pas se laisser influencer par la pression sociétale, et de vivre à notre rythme!

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