Alors j’étais en train de me préparer pour une potentielle entrevue (on est jamais assez préparées et prévoyantes) avec des questions fournies par des amies qui étaient passées par là avant moi.
J’arrive à la question : « quelles sont tes ambitions? »
Et là, vraiment, la fille qui parle tout le temps et qui adore parler, eh bien elle ne savait pas quoi répondre.
Je suis arrivée à la conclusion que j’en n'avais pas. Moi, Daphnée, je n’ai aucune ambition. Ou du moins, je ne me permettais pas d’en avoir.
J’ai toujours pensé de moi que j’étais correcte. Correcte en général, dans pas mal toute. Physiquement, au niveau de ma personnalité, au niveau de l’intelligence, au niveau des capacités, au niveau du talent. Correcte.
Et une personne juste correcte, est-ce qu’elle a le droit d’avoir de l’ambition? Non, elle est juste correcte. Elle s’attend à avoir des choses correctes, pas trop impressionnantes, pas trop décevantes ; normales. Ça va de soi.
Mais pourtant, c’est moi qui ai décidé que j’étais seulement correcte. C’est moi qui ai laissé la barre à ce niveau, qui a assumé que je ne pouvais pas aller plus haut. C’est moi qui ai assumé qu’il y aura toujours un paquet de gens plus intelligents, plus beaux, plus gentils, plus compétents que moi, et qui eux, feront de grandes choses. Mais moi, je n’ai pas ce qu'il faut.
Dans mon domaine d’étude, avoir de l’ambition et réussir, c’est travailler dans un gros cabinet. C’est être une personne influente et bien placée, qui travaille facile 70h par semaine.
J’ai tout de suite assumé que je ne serai jamais cette personne. Pas parce que ça ne me tente pas, pas parce que je n’y pense pas. Parce que forcément, je ne suis pas capable, je n’y arriverai pas. Je suis seulement une personne correcte qui peut faire des choses correctes.
Et c’est vraiment en y réfléchissant que ça a débloqué. J’ai le droit, moi aussi, d’être ambitieuse. J’ai le droit de vouloir accomplir de grandes choses, j’ai le droit de penser que je serai capable de les atteindre, ces objectifs. La seule limite que j’ai, pour l’instant, c’est cette petite voix qui me susurre que c’est stupide de penser que ces ambitions sont réalistes.
En entrant dans mon programme, j’ai eu les mêmes petites voix. Et je les ai encore. Mais à voir toutes ces personnes autour de moi (beaucoup de femmes d’ailleurs, très fière de voir toutes ces jeunes femmes ambitieuses qui ne reculeront devant rien pour se tailler une place à leur image), avec une ambition inattaquable, je me suis dit que je pourrais, moi aussi, faire comme elles. Avoir de l’ambition.
Ainsi, en date d’aujourd’hui, j’ai renoué (voire découvert) cette petite chose appelée ambition. C’est une chose curieuse, effrayante, mystérieuse. Mais elle me drive comme je ne l’ai jamais été, et elle me pousse vers des résultats, des actions qu’une fille correcte comme moi n’aurais jamais pu espérer.
La fille correcte en moi est impressionnée. Et croyez-moi, elle n’a pas fini de l’être.