Aller au contenu
Ndèye Fatou Kane ou comment repenser le féminisme
Crédit: Éditions L'Harmattan
À 31 ans, cette Sénégalaise, grande férue de littérature, blogueuse depuis une huitaine d'années (cequejaidanslatete) et romancière (Le Malheur de vivre, Éditions L'Harmattan 2014 et Franklin, l'insoumisLa Doxa, 2016), ajoute une nouvelle corde à son arc en devenant essayiste avec Vous avez dit féministe? (Éditions L'Harmattan 2018), un court essai suivi d'une fiction intitulé (In) certitudes.

 

Crédit : Éditions L'Harmattan
« Vous avez dit féministe ? », un éveil des consciences, un message à véhiculer ou une histoire à conter? Pourquoi une telle interrogation? 
Avant de répondre à la question, je tiens à préciser qu'écrire un ouvrage sur le féminisme n'a jamais été dans mes prérogatives. Mais une conversation arrivée un peu par hasard – où je me fais traiter de « féministe » (à tort ou à raison?) – m'a convaincue d'écrire cet ouvrage.

Pourquoi cette interrogation? Parce que je tenais moi-même à répondre à un questionnement, je cherchais à voir ce que ce terme signifie encore (pour moi) et pour toutes les jeunes femmes s'intéressant à la question du féminisme. Car il est dommage de voir ce terme chargé d'une si forte dose de négativité, alors que des femmes se sont battues et continuent de se battre pour que le féminisme ait ses lettres de noblesse.

(In)certitudes?
C'est un texte de fiction d'une dizaine de pages qui est, en quelque sorte, le prolongement de l'essai. Dans ce texte, une femme est en proie à des questionnements existentiels tels que son statut matrimonial, les choix malheureux qu'elle a eus à faire, son absence de réussite face à une amie à qui tout semble sourire. Ce mal-être trouve sa source dans une enfance malheureuse, face à une mère qui s'est tuée à la tâche pour satisfaire un mari imbu de lui-même.

(In)certitudes relance donc le débat autour de la place de la femme dans la société et de la marginalisation dont certaines souffrent… Je n'en dirai plus, je vous invite à la lire à la fin de l'essai!

Qu'est-ce qui a changé depuis la parution du « baby book », Le malheur de vivre?
Déjà j'ai relevé le défi d'écrire un roman. Je dois avouer que tout est parti de mon blogue Ma petite bulle, dont les lecteurs ne cessaient de vanter ma plume et me pressaient de me mettre au roman. 
J'ai donc essayé et le Malheur de vivre est né. Beaucoup d'opportunités sont nées, autant littéraires que professionnelles, et ça m'a donné le courage de continuer à écrire. Rien de plus gratifiant pour un auteur de voir ses oeuvres lues, partagées, commentées…  Je remercie donc toutes ces personnes qui me suivent au quotidien dans mes pérégrinations littéraires.

 

 
Revenons sur le sujet du féminisme! Que t'évoque le terme « afro-féministe »?
Je n'aime pas tous ces termes ayant le préfixe « afro » tels que : afro féminisme, afropéennes, afrodescendantes ou encore afropolitaines. Pour moi, ils ne servent qu'à creuser le fossé déjà bien grand entre personnes « de couleur » et les autres.

Toutefois, concernant le féminisme, je suis d'accord que les considérations d'une Simone de Beauvoir seront différentes de celles de Mariama Bâ, car les espaces spatio-temporels ne sont pas les mêmes. Cependant, essayer de faire le mix des combats de toutes ces femmes permet de repenser le féminisme aujourd'hui. Donc je réfute le terme afro-féminisme.

Avec ce nouveau livre, certains te décriront déjà comme une audacieuse écrivaine. L'audace est-elle nécessaire pour être féministe?
Écrivaine audacieuse, peut-être, mais je suis d'avis que quand on écrit, on ne peut être aphone face aux problématiques de notre époque. Et comme je m'inspire beaucoup de ce qui se passe autour de moi, je ne peux y être insensible. On peut être audacieuse ou même téméraire pour se réclamer du féminisme, j'y rajouterais qu'il faut aussi être une personne de son époque.

As-tu eu des appréhensions avant sa sortie sachant que le mot féminisme est rejeté par plus d'un.e?
Non, car j'étais consciente que le terme féminisme n'est pas le plus fédérateur qui soit, donc les critiques, je m'y attends et les attends de pied ferme! 

En quatrième de couverture, tu cites quatre femmes de divers horizons. Qui sont-elles pour toi, dans ton « combat » de femme du 21e siècle?
Mariama Bâ, Chimamanda Adichie, Awa Thiam et Simone de Beauvoir sont les quatre femmes dont je cite les œuvres et fais une lecture croisée de leurs ouvrages. Il est vrai qu'une bibliographie fournie existe sur le sujet du féminisme, mais pour moi ces quatre femmes étaient les plus importantes dans la gestation de Vous avez dit féministe?

Simone De Beauvoir avec Le deuxième sexe qui, quoi qu'on puisse dire, est un ouvrage de référence pour qui souhaite travailler sur le féminisme, Awa Ghiam et Mariama Bâ, en plus d'être mes compatriotes, ont osé mettre les mots sur les maux dont souffraient la femme sénégalaise à une époque pas si évidente et Chimamanda pour le vent de fraîcheur qu'elle apporte avec le happy feminism.

Oublions un peu le livre et parlons de toi. Que représente l'écriture pour toi?
L'écriture est mon exutoire. J'écris pour exister, pour me sentir bien, l'écriture est ma passion, j'écris aussi pour entrer dans la postérité et que mes écrits me survivent et servent aux générations futures.

 

Crédit : Willy Ndaw/Facebook
Est-ce que la tienne s’enferme dans un certain code sexuel?
Il est vrai que les femmes ont une sensibilité qui leur est propre, une sorte de sixième sens que les hommes n'ont pas, mais je ne me vois pas comme une auteure enfermée dans un code sexuel, non.

Es-tu une auteure dans sa bulle ou tu te sens concernée par les enjeux de notre société?
Entièrement concernée par les enjeux de la société dans laquelle je vis. J'y puise ce qui m'est nécessaire pour nourrir mon œuvre.

L'argumentaire, ton dada. Vrai ou faux?
Absolument vrai! La contradiction, les débats d'idées me font vivre, me passionnent et me font réfléchir.
La preuve, Vous avez dit féministe? est le fruit d'une discussion passionnée.

Où peut-on trouver tes livres?
Sur Amazon, sur le site de des Éditions L'Harmattan… Google est votre ami!

Et toi, tu es sur …
Facebook : Ma petite bulle et Le malheur de vivre
Twitter : @EneffeKei
Instagram : eneffe_kei

Plus de contenu