Je suis devenue une dominatrice il y a quatre ans, de celles en talons hauts avec un fouet et des menottes, qui mettent en laisse des hommes soumis,qu’on appelle des « esclaves ». Peut-être que vous avez en tête une femme habillée constamment en latex ou en cuir… Ce n’est pas mon cas.
Je ne m’habille pas souvent sexy et rarement en latex. Je n'assiste pas à des événements organisés par la communauté fetish de Montréal. D'ailleurs, je n’ai aucune relation sexuelle, ni même de contact physique avec les hommes que je soumets. Le BDSM n'implique pas nécessairement tout ça. Chacun décide de ses besoins et limites. Tout de même, je crie, j’insulte, j’humilie, je fais boire l’eau des toilettes pendant que je fouette… Bien entendu, tout cela se passe dans un cadre totalement consentant.
Vraiment, je n’ai jamais eu aucun intérêt particulier pour le BDSM avant de devenir dominatrice, même que je dirais que j’entretenais des préjugés par rapport aux gens qui évoluent dans ce domaine, surtout envers les soumis. Un peu par hasard, un homme qui était alors, mi-connaissance, mi-ami, m’a parlé un jour de son fétiche pour les talons hauts et m’a confié qu’il aimait aussi se faire dominer par des femmes. Il m’a proposé d'être mon « esclave ». J'ai accepté. Être une dominatrice a commencé, pour moi, comme un défi personnel.
Au début, je craignais de ne pas être à la hauteur. C’est quand même surprenant, car je ne ressemble pas à ce que vous voyez lorsque vous faites une recherche Google sur le sujet! J’étais fière d’avoir réussi à faire une séance complète. Ce que j’ai trouvé le plus difficile à mes débuts est de dominer un homme qui, je dois le dire, ne m’a rien fait de mal.
Être un.e dominant.e peut sembler se résumer à prendre un fouet et jouer avec son partenaire sexuel ou amoureux. Dominer une personne physiquement et psychologiquement pendant une session complète n’est pas si simple, ça prend du cran. C'est quelque chose qui ne vient pas avec le fouet acheté dans une boutique érotique et qui ne s'apprend pas avec le fameux Christian Grey.
En m’entraînant, je suis devenue meilleure dans mon rôle. J’aime être une dominatrice. Cela me fait sentir puissante. Cela me permet de faire des choses que je ne ferais pas normalement et cela, dans un cadre légal et consentant.
Toutefois, je me suis souvent questionnée sur le caractère moral et éthique de ce que je fais. J’utilise le mot « esclave » à gauche et à droite, en me demandant si je ne banalise pas tout ça. Je me moque de ce que je fais auprès de mon entourage, en me demandant si je ne le fais pas pour démontrer que je n'ai pas une vie ennuyeuse. Qu'est-ce qui me motive à être une dominatrice? Ai-je un vide à combler? Est-ce que j’abuse de la vulnérabilité de quelqu’un?
En ce moment, je prends une pause pour décider si je continue. Si oui, avec quelles conditions? Cependant, je remets souvent en question ce que je fais et j'ai souvent envie de laisser tomber ça pour me concentrer sur d'autres aspects de ma vie.
Ça reste à voir…