Je sais, je sais, on parle déjà de la rentrée scolaire, les cahiers Canada s'accumulent sur les tablettes des grandes surfaces, les agendas se vendent comme des petits pains chauds, il faut commencer à déchiffrer la liste des effets scolaires du plus vieux et c'est déjà le moment de marquer au fer rouge, avec de bonnes intentions, tous les événements importants sur nos planificateurs.
Mais l'été n'est pas encore terminé et il reste encore quelques semaines pour se plonger tête première dans un livre, écrit par une femme, de surcroît! Quelle meilleure alternative que de voyager dans un livre? Encore une fois, pour la série Femmes de paroles, je vous propose cinq lectures d'auteurEs qui pourront certainement vous distraire de septembre qui guette dangereusement la fin de la saison estivale…
La servante écarlate, Margaret Atwood
Je ne pouvais tout simplement pas passer à côté. Après l'avoir reluqué pendant tant d'années, sans jamais ne mettre la main dessus, parce que la pile de livres sur ma table de chevet est sur le point d'atteindre le plafond, j'ai cédé. Loin d'être une nouveauté, ce roman dystopique écrit en 1985 rappelle sans contredit le classique 1984 de Georges Orwell. Le titre vous sonne probablement quelques cloches. Il vient tout récemment d'être adapté en série télévisée pour les ondes de la chaîne Bravo. L'histoire se déroule dans une société totalitaire où la fertilité des femmes est en chute libre. Defred, la protagoniste, se voit confinée au rôle de reproductrice. Un roman qui fait réfléchir au contrôle que peut avoir la société sur le corps des femmes. Malgré les 32 années qui nous séparent de sa naissance, La servante écarlate est encore, fâcheusement, d'actualité.
Bien que publié en 2013, le premier roman de Marie Larocque vient tout juste d'être réédité en format poche et j'en profite pour le glisser en suggestion ici. Lors de sa parution, je l'ai dévoré d'un trait. Je me suis attachée rapidement à la narratrice, Jeanne, qui de façon poignante, drôle et intime raconte les aléas de sa famille dysfonctionnelle du Plateau Mont-Royal des années 70. On suit Jeanne Fournier de l'âge de 7 à 20 ans, à travers bribes de journal intime et de narration à la première personne, vivant dans un milieu pas plate pantoute, où les personnages rocambolesques et déjantés de son entourage se mêlent à un goût pour la jeune adolescente de l'écriture et de la lecture dans un univers excessif. Le ton cru de l'écrivaine me rappelle sans doute Michel Tremblay meet Christiane F. De plus, la suite, L'autre Jeanne, est parue tout récemment!
J'avais vraiment apprécié ma lecture de Geisha, il y a quelques années, et Fille de joie a sans contredit le mérite de faire écho à ce roman. L'action se déroule au Japon, à la naissance du vingtième siècle, où Ichi, l'héroïne, devient prostituée dans une maison close à l'âge de 15 ans. Vendue par ses parents, elle se voit projetée dans un monde où l'on devient femme malgré soi, trop vite et surtout sans le vouloir. Le ton est parfois violent, sans toutefois manquer de sensibilité. C'est que l'auteure est crue : elle ne laisse rien en arrière-plan. Malgré tout, Ichi fréquente l'école et c'est par le biais de son éducation qu'elle prendra conscience qu'elle est maître de son corps et de ses choix. Déjà têtue et un peu rebelle, elle tentera peu à peu de changer quelques mentalités…
L'enfant dans le miroir, Nelly Arcan & Pascale Bourguignon
J'ai longé de nombreuses librairies d'occasion sans jamais pouvoir mettre la main sur cette œuvre de sainte Nelly Arcan. Paru en 2007, la première édition était un bijou introuvable et je m'en mordais les doigts à chaque fois que je sortais d'une librairie. À mon grand bonheur, ce conte amer a revu le jour sous une toute nouvelle édition à couper le souffle, où les illustrations de Pascale Bourguignon se mêlent à la plume typographiée de Nelly de façon homogène. Fascinée par le reflet qu'elle voit d'elle-même dans la glace, une jeune fille nous raconte ses angoisses. Hantée par les insultes du père et l'alcoolisme de la mère, la jeune enfant devient un peu, malgré elle, martyre de l'image de soi. Doux et pénible à la fois. Une réflexion et une critique sur l'importance de l'image corporelle dans une société moderne. (Je reviens sur les illustrations : juste wow.)
La première fois où j'ai entendu parler de Marie Darsigny, j'étais assise par terre, devant une église, lors d'une soirée de poésie féministe organisée par la librairie La Flèche Rouge. Je me laissais bercer par les voix des lectrices qui lisaient à l'avant. Puis, Marie a été appelée pour lire quelques poèmes. J'ai vu une jeune femme aux longs cheveux noirs, énergique et pimpante monter les quelques marches du parvis, ouvrir la bouche et réveiller les quelques centaines de personnes amassées dans la chaleur de septembre. Ses poèmes reflètent une réalité tout à fait touchante, où elle étale blanc sur noir quelques bribes de nostalgie bien aussi que maux du présent. Queen de la Plaza St-Hubert, elle mêle mélancolie et rose glitter. Visites au CLSC et déclarations d'amour aux filles. Un bijou.
Quel est le livre qui vous a le plus marqué.e.s cet été? Quelle est votre prochaine lecture?