Le dernier arrêt de la série Féminisme Ink se trouve au XS Tattoo de la rue Crescent où j'ai eu la chance de rencontrer la talentueuse Aisha Hadejia.
Pourquoi se faire tatouer?
Pour moi, il y a plusieurs raisons. Plus jeune, le tatouage m’a permis de me réapproprier mon propre corps. C’est une décision qui est devenue de plus en plus pertinente avec le temps parce qu’elle n’appartenait qu’à moi-même. Maintenant, je la considère comme un acte d’empowerment.
Crédit : ahadejia/Instagram
Un tatouage qui t’as marquée…
Tous les tatouages sont spéciaux. Celui sur mon bras a évolué au fils de ma carrière. J’ai commencé par ma main, ce qui le rendait très visible, et il a grandi avec ma progression comme artiste tatoueuse. C’était mon engagement envers mon métier et mon art.
Une expérience difficile…
Mon apprentissage en salon a été difficile. Je voulais trouver quelqu’un qui croyait en moi comme je croyais en moi-même tout en restant tout à fait honnête. Finalement, j’ai beaucoup appris en tatouant des ami.es qui m’offraient l’opportunité de me pratiquer sur leur peau. Tous les jours, je fais face à des nouveaux défis ; la pratique d’un art permet de toujours grandir. Être satisfaite de ce que je fais et mériter la confiance de mes client.e.s est à la fois stimulant et challenging.
Quel est le processus pour se faire tatouer par toi?
Me contacter d’abord. J’aime comprendre pourquoi les gens veulent se faire tatouer. Pour moi, le processus de consultation est important pour avoir une idée de la personnalité de la personne que je vais tatouer. Ça me permet de mieux comprendre ce que la personne veut.
Crédit : ahadejia/Instagram
Flashes ou customs?
Je me sens plus familière avec mes propres dessins, c’est plus facile. Je les considère comme une définition, une extension de moi-même sur le corps de quelqu’un d’autre. Par contre, tous les tatouages sont intéressants à dessiner.
Travailler dans un street shop, c’est…
Une expérience qui m’a permis de m’améliorer. J’ai accordé beaucoup d’importance à cet exercice : c’était important pour moi d’y débuter ma progression. J’ai eu la chance de rencontrer des artistes très talentueuses. Je pars bientôt du XS pour rejoindre avec Christian Lanouette dans son nouveau salon privé ; je pourrai y travailler aux côtés d'un tatoueur avec plus expérience que moi et avoir un mentor qui pourra me conseiller et m'aider à devenir une meilleure tatoueuse.
Comment être féministe se traduit dans ton travail?
Pour moi, il est difficile de ne pas être féministe. En tant que femme de couleur, j’ai toujours travaillé plus fort pour me prouver face à différents niveaux d’oppression systémique. Cela ne signifie pas que mon travail doit être explicitement féministe ou même explicitement orienté vers la race. Même si le tatouage est historiquement lié à des cultures d’Afrique et d’Asie, dans notre société moderne, il existe en grande partie comme un domaine dominé par des hommes blancs. Pour moi, l’acte féministe, l’acte d’empowerment est de prendre cet espace comme femme noire tatoueuse.
Être ici est un acte d’empowerment pour moi-même, mais je suis très fière de faire mon travail aussi pour montrer à d’autres comme moi, d’autres femmes et d’autres personnes de couleur, que cet espace est aussi à eux et elles. S’il y a une chose que je peux réaliser, c’est d’encourager les gens è se lever et à réclamer leur place, partout où ils le souhaitent. Pour les minorités, il y a toujours des risques lorsqu’il est question de suivre nos passions, mais si nous ne le faisons pas, personne ne nous offrira de les réaliser à notre place non plus.
Crédit : ahadejia/Instagram
Penses-tu que c’est plus difficile comme femme de réussir dans le monde du tatouage?
À une époque, oui. Aujourd’hui, beaucoup de femmes percent et réussissent une brillante carrière dans l’industrie. Nous avons peut-être plus à prouver, alors nous sommes plus intéressées. Il faut persévérer : never take no as an answer.
Crédit : ahadejia/Instagram
Pour lire la série complète, voici les entrevues précédentes : Sabrina Avakian, Camille Francœur Caron, Emilie Bessette et Charline Bataille.