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Stéphanie Harvey, la Québécoise qui transforme l’industrie du jeu vidéo
Crédit: Aurélie Bellacicco

On ne va pas se le cacher, l’industrie du jeu vidéo n’est pas reconnue pour ses illustrations d'inclusion et de tolérance (on se rappelle le #GamerGate). Stéphanie Harvey (aussi connue sous le pseudonyme de missharvey) a pourtant décidé d’attaquer le problème de front. L'ex-conceptrice de jeux chez Ubisoft et multiple championne du monde sur Counter-Strike : Global Offensive est aussi une porte-parole pour l'inclusion des femmes dans la culture geek et du jeu vidéo. Résidant actuellement à Los Angeles pour poursuivre sa carrière de joueuse professionnelle, Stéphanie a aussi récemment remporté le premier prix à l'émission Canada's Smartest Person. Entrevue avec une fille de Québec qui sait laisser sa marque.

Counter-Strike est un jeu de tireur à la première personne. As-tu toujours été attirée par des « jeux de gars »?
Je n'ai jamais vu les shooters – ou les jeux vidéo tout court – comme des jeux de gars. Quand j'étais petite, je jouais avec des Legos, des Barbies, des Méga Bloks… Mes parents ne m’ont jamais dit « ça c’est pour les gars, ça c’est pour les filles ». J’ai des photos de moi avec une poupée dans une main et un Gameboy dans l’autre.

Crédit : stepharvey/Instagram
 

J'étais surprise de voir qu'il y avait des compétitions juste pour les femmes. Pourquoi la distinction?
C'est une question de visibilité afin de promouvoir le gaming chez une minorité. C’est grâce à ça que j’ai commencé à jouer professionnellement. Sérieusement, je pense que la plupart des filles qui sont au niveau pro ont commencé en regardant ces compétitions.

Tu dis avoir été confrontée à des commentaires haineux au cours de ta carrière, si bien que tu y es plutôt désensibilisée. D'où vient toute cette haine selon toi?
Écoute, j’ai de la misère à comprendre pourquoi les gens ont voté pour Trump donc c’est une question difficile. Il y a quelque chose de la peur de l'inconnu et aussi un effet d’entraînement. C'est la mentalité de « soit tu la détruis, soit elle te bat ». C'est une façon très immature de contrebalancer le fait qu’ils viennent de perdre. Ce genre de comportement fait du bien à leur ego.

Est-ce que parfois tu vis cette misogynie ailleurs que derrière ton écran?
Je suis une personnalité connue donc c'est assez rare que les gens aient le courage de venir m’insulter en personne. Mais dans mon travail de conceptrice de jeux, c’est arrivé souvent. Dans mon univers professionnel, il a toujours fallu que je prouve que j'étais compétente pour gagner le respect. Les hommes n'ont généralement pas ce problème. On assume qu'ils sont compétents jusqu’à preuve du contraire.

Crédit : stepharvey/Instagram

En 2014, tu as fondé Misscliks, une plateforme prônant l'ouverture et la diversité au sein de la culture geek et du jeu vidéo. Comment t'est venue l'idée?
J'ai toujours eu une idée vague que je voulais rassembler les femmes pour qu’on soit plus fortes. Quand j'ai commencé à mettre ça sur papier, j'ai découvert Anna Prosser [Robinson] qui compétitionnait alors pour devenir Miss USA. J'ai trouvé ça tellement motivant de voir quelqu’un représenter la communauté de façon positive que je l'ai contactée tout de suite. Quelque temps plus tard, nos deux meilleures amies se sont jointes à nous pour créer Misscliks.

Tu as été nommée l'une des 100 femmes de 2016 par la BBC et donnes des ateliers et des conférences un peu partout. À quel point le travail de sensibilisation que tu fais est-il important pour toi?
C'est très important, si bien que souvent je trouve que je n'en fais pas assez. Le mot « féminisme » crée beaucoup de controverse, même en 2017. Mais s'il y a une chose que j'essaie de communiquer le plus possible, c’est que nous vivons dans une société misogyne et sexiste, même si on ne s’en rend pas compte la plupart du temps. Par exemple, tout le monde nous dit qu'il faut s’aimer comme on est. Mais à 30 ans, je ne peux toujours pas m'empêcher de penser ce dont j’ai l’air en maillot de bain. C'est un phénomène de société important. Il faut s'ouvrir les yeux et se poser des questions, et ce même si on ne s’identifie pas comme féministe.

Vous en voulez plus? Lisez la suite de cette entrevue dans ce Portrait de marque : Stéphanie Harvey.

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