NDLR – Dans ce témoignage, il est question d’un homme, mais le trouble hypersexuel peut être diagnostiqué autant chez les hommes que chez les femmes. Il est cependant admis dans la littérature scientifique qu’il est présent en plus forte proportion chez les hommes1.
Il y a quelques années, j’ai été en couple avec un homme plutôt introverti et timide. Nous nous sommes fréquentés pendant quelques années jusqu’à ce qu’il accepte (enfin) de me parler de sa feuille de route sexuelle vierge, quoiqu’il soit mon aîné de plusieurs années. Cela ne m’avait alors pas inquiétée, mais j’avoue que le fait qu’il refuse de me l’avouer en deux ans de couple m’avait laissée perplexe.
De fil en aiguille, notre couple est devenu un triangle amoureux avec un élément non désiré de ma part, la consommation phénoménale de pornographie de mon partenaire. Entendons-nous bien, je n’ai rien contre la consommation de pornographie chez les adultes. Ce qui me dérange, c’est l’image qu’elle entretient pour les jeunes sans expérience, le fait que la femme soit souvent dans des positions dégradantes et qu’elle ne reflète en rien la réalité d’une vie sexuelle consentante et épanouie. Dans ce cas-ci, je ne vous parle pas d’un monsieur qui consomme de la pornographie de temps à autre, ce qu’on a tendance à normaliser en ce qui a trait aux hommes et qui est totalement faux… Non, je vous parle d’un vrai problème de dépendance.
À travers les années, cette troisième roue à notre carrosse a eu des conséquences graves. Entre autres, une aventure dans le Sud mal protégée qui l’a fait craindre d’être atteint d’une grave ITSS, rien de moins que le VIH. Les personnes atteintes de dépendance à la pornographie (trouble hypersexuel) peinent à contrôler leurs impulsions. Elles peuvent servir à calmer les périodes de grand stress, notamment, en raison de la forte dose d’endorphines qu’elles dégagent. À ce stade, cette dépendance peut se comparer aux effets d’une drogue2. Et avec l’accessibilité à la pornographie, il devient encore plus difficile de se contrôler. Imaginez alors un voyage où il n’y a pas de WiFi et beaucoup de prostituées qui vous font des avances sur les coins de rue…
Bref, rendu au point de prendre de tels risques en raison d’un besoin incontrôlable de consommation, il y a raison de consulter, ce que mon partenaire a refusé de faire malgré mon appui.
Toujours est-il que quelques années plus tard, je l’ai quitté. Parce que oui, j’ai tenté de l’aider à travers cela en gardant le secret douloureux de l’aventure, du test de séropositivité négative, etc.
Vous vous doutez que la rupture qu’il n’avait pas vue venir a été pour lui un prétexte de consommation très fort. Il s’est mis à consommer tant et tellement qu’il ne pouvait s’abstenir de le faire, même dans des lieux publics ou sur son lieu de travail, à un point où il a paniqué en croyant qu’il s’était fait prendre.
Je ne sais pas ce qui s’est passé, mais mon ex-partenaire a complètement disjoncté en s’imaginant qu’il était suivi et cela s’est terminé par un internement temporaire. Bref, il n’y avait pas que cela, mais le trouble hypersexuel a contribué à l’attirer dans une espèce de spirale de laquelle il lui était devenu impossible d’immerger sans aide.
Je ne souhaite pas ici dire que tous les grands consommateurs de pornographie ont un trouble hypersexuel. Par contre, je souhaitais vous conscientiser à ce trouble qui peut faire beaucoup de ravages chez des individus et leurs proches.
Si cet article soulève chez vous plusieurs questionnements, il vaut peut-être mieux considérer demander de l’aide.
Sources :
1. Psychologie Québec – Dossier sur le trouble hypersexuel
2. Conférence «Quand la sexualité devient une drogue» de la sexologue Isabelle Proulx, professeure à l’Université Laval
Pour demander de l’aide :
Association des sexologues du Québec
Les sexoliques anonymes