Il y avait certainement des signes, il avait changé tant dans ses habitudes que dans son attitude. Puis un jour, nous avons trouvé la preuve qu’il consommait et c’est là que l’implosion lente a commencé. On aurait dit que du moment où nous l’avions confronté et qu’il savait que nous étions au courant, il a commencé à s’enfoncer plus profond dans la drogue. Il n’avait plus à se cacher, après tout. Nous sommes devenus codépendants ce jour-là.
Rapidement, voici une définition de codépendance du site Oser en parler : « La codépendance, ou dépendance relationnelle, est un ensemble de comportements inadéquats dans lesquels une personne s’implique au travers de la relation avec une personne dépendante. Le codépendant se fait une obsession de contrôler le comportement d’une personne dépendante, malgré les conséquences que cela peut engendrer dans sa vie, ou dans celle de l’autre ».
Effectivement, nous n’avions aucun outil pour nous préparer à supporter mon frère dans cette situation ni nous supporter nous-mêmes. Nous en souffrions autant que lui, à un niveau différent. Personnellement, j’ai vu mon petit frère disparaître tranquillement dans un nuage de poudre et de mal-être tellement profond que je refusais de passer du temps avec lui. Je voyais mes parents s’acharner à tenter de l’aider en l’obligeant à aller à des rencontres de NA ou des centres de désintoxications, en contrôlant ses actions ou en le suivant partout.
Moi, ce que je remarquais surtout, c'était le fait que mon frère retournait constamment vers la cocaïne. J’ai vu mes parents s’effacer peu à peu, subir une pression énorme, et ma famille se détériorer au point où j’ai précipité mon déménagement du nid familial, et ce, malgré le fait que je n'étais pas prête financièrement. C’était ma façon à moi de me sortir de tout ça, je venais de refuser de laisser mon frère gâcher ma santé mentale et physique.
Ce jour-là, je suis sortie de ma codépendance. Ce fut difficile : je vivais avec le sentiment que je l’abandonnais, que ça voulait peut-être dire que je l’aimais moins et que je souhaitais qu’il continue sa consommation de cocaïne. J’avais le sentiment que je n’accomplissais pas mon rôle de grande sœur : le protéger. Puis, c’est en cherchant de l’aide dans mon entourage, en discutant avec des gens vivant des choses similaires que j’ai compris que c’était par amour pour moi et pour lui que je m’éloignais, pour mieux lui tendre la main le jour où il serait prêt à vouloir s’aider lui-même.
Enfin, il n’y a aucune honte dans le fait d’aller chercher de l’aide lorsque nous vivons avec quelqu’un souffrant d’une dépendance comme le mentionne cet article. En fait, c’est souvent dans ces rencontres que nous réalisons l’ampleur de nos actions et que nous bâtissons des mécanismes pour mieux nous en sortir. Ce que j’ai compris de mon expérience, c’est qu’en étant codépendants, nous n’aidions pas mon frère, nous l’habilitions à consommer. Enfin, mes parents lui ont dit de se trouver un appartement, et depuis, à travers quelques rechutes, nous avons vu une montée vers la guérison autant pour lui que pour nous. Nous étions tous sortis de la codépendance.