L’Euguélionne a ouvert ses portes le 15 décembre et tenait son festival d’ouverture du 3 au 9 février. La sixième journée du festival portait sur l’écriture du trouble alimentaire. Une table ronde de trois auteurs Fanie Demeule (auteure de Déterrer les os), Annie Loiselle (auteure de Les Affamées et Ça ira) et Clara B.-Turcotte (auteure de Demoiselles-cactus) était mise en place. Elles ont pu discuter de leur processus d’écriture et de leur point de vue sur la vision sociale erronée des personnes qui souffrent de troubles alimentaires.
Fanie, Annie et Clara ont su démontrer qu’autre chose se cache derrière le trouble alimentaire. L’identité d’une personne ne se définit pas seulement par un trouble et la souffrance vécue peut avoir plusieurs visages. Elles ont choisi de ne pas axer leurs récits sur les symptômes, de ne pas nommer le trouble et de ne pas entrer dans des descriptions froides et dénuées de sensibilité. L’important c’était d’abord d’écrire pour elles-mêmes, parfois pour se débarrasser, puis pour partager l’expérience intérieure d’un personnage.
Les auteures ont aussi voulu déconstruire l’archétype de l’anorexique ballerine blanche, riche, et première de classe qui réussit dans tout. Cette image de contrôle est souvent glorifiée et valorisée, alors qu’elle n’existe à peu près nulle part. Les auteurs cherchent à abattre ce faux visage dans lequel elles ne se sont jamais reconnues. Elles ont également relevé la propension sociale à ne parler que de l’anorexie alors que la grande majorité des gens qui souffrent de trouble alimentaire passent par une phase de boulimie.
Les auteures ont soulevé un point important : si l’auteur était un homme et que le protagoniste souffrait de dépression dans le roman, il ne serait pas ausculté en profondeur comme une femme. Après la parution de leur roman, elles ont ressenti cette curiosité un peu malsaine des médias par rapport à leur vécu personnel. Annie Loiselle soutient d’ailleurs que « l’auteure » n’est pas la « narratrice » et que cela devrait être mieux enseigné en milieu scolaire. Par exemple, le lectorat pense, à tort, que tout ce qui est rapporté fait référence au vécu de l’auteure. Pourquoi jugeons-nous les auteures plutôt que l’œuvre? Clara B.-Turcotte, soulève aussi la pression totalement injuste pour les personnages féminins d’être sympathiques et gentilles.
Les réflexions sur la littérature, le féminisme et la santé mentale continuent d'évoluer et c'est tant mieux! Je vous conseille vivement de lire les œuvres de ces trois auteures fascinantes (si ce n'est pas déjà fait).
Bonne lecture!