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Les poils, les femmes et les galas : pourquoi ça fait encore jaser?
Crédit: lolakirke/Instagram
Je ne suis jamais allée dans un gala. Et bien que je ne me sois pas posé la question jusqu’à tout récemment, je réalise que je n’aurais aucune envie d’y mettre les pieds. Ce qui devrait être une simple occasion de célébrer semble se transformer en occasion pour émettre une opinion méprisante à propos de l’apparence d’autrui (aka, une des affaires qui m’énerve le plus de l’univers).

Lola Kirke, actrice britannique, s’est présentée aux Golden Globes 2017 armée de sa pilosité naturelle. Une simple recherche sur les interweb permet de constater l’indignation soulevée pour ces quelques poils chez nos voisins du sud. Le Québec n’est pas en reste, puisque moult commentaires négatifs apparaissent sous les publications d’ici. Des commentaires qui ne sont pas sans rappeler ceux qui furent réservés à Safia Nolin suite à l’Adisq 2016. On y retrouve, entre autres, des questionnements quant aux habitudes de rasage « down there » de Lola, des présomptions de manque d’hygiène (!?!?) et du gros sexisme qui s’indigne qu’une femme ne réponde pas aux normes occidentales en matière de soi-disant beauté. Le tout entrecoupés d’émoticônes dégobillant et de « yark ». Édifiant!

Crédit : Lola Kirke/Instagram
Après vérification, non, « Gala » n’est pas un nom de code secret signifiant « on fait comme en 1932 le temps d’une soirée ». Par 1932, je désigne surtout le sort réservé aux femmes qui refusent les dictats. Révolue l’époque où le corps féminin est soumis aux demandes et aux normes? Apparemment, non.

Les exigences quant à la gestion du poil en cette contrée nord-américaine semble nous dire de n’en avoir aucun, sauf sur la tête. Ce poil-là, le poil de tête, c’est le bon poil. Le poil qu’il faut revitaliser, peigner, teindre, mettre en valeur. Mais le poil de jambe, de pubis, de visage et d’aisselle, c’est le méchant poil pas propre.

Mais… tout ça n’est que construction sociale quant à la pilosité. Le poil, c’est du poil. C’est tout. En avoir ou non, et comment on l’enjolive, devrait être exempt de pression extérieure. Malgré la forte pression quant au rasage, bien que souvent implicite, ceux et celles qui résistent ne devraient pas être l’objet de shaming. La culpabilité, c’est dépassé. En faire ressentir aux autres, aussi.

Être une femme, c’est souvent recevoir beaucoup d’attente face à notre apparence. Ok, que ça soit clair, ça aussi c’est out. Ce qui est in, c’est la liberté. Genre, la liberté de ne pas être l’objet d’attentes archaïques en fonction de notre identité sexuelle.

Je suis flabbergastée d’avoir à écrire que le poil n’est pas un manque d’hygiène et que la beauté est subjective. Qui plus est, que notre vision de la beauté n’est jamais LA bonne, puisque ces visions sont plurielles et propres à chacune. Ne pas aimer les dessous-de-bras frisés, c’est chill, mais on se calme le yark, s’il vous plaît. L’idée qu’un gala soit l’occasion de se mettre beau ou belle est justement l’expression de cette unicité. Pis t’sais, y’a du monde qui s’en sacre des paillettes. Et c’est parfait de même. Est-ce seulement possible de ne pas les attaquer? Par ailleurs, on se rappelle que « c'est un gala » n'est jamais un argument.

 
À noter que Lola, après avoir reçu insultes et menaces de mort (heureusement, des commentaires très élogieux ont suivi), ne lira sûrement pas ces commentaires francophones. Sauf que toutes les femmes qui les lisent se font rappeler par ceux-ci que ce traitement pourrait être le leur si elles choisissent de ne pas se conformer.

Sommes-nous vraiment bien collectivement avec l’idée de créer un environnement hostile à l’expression corporelle? 

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