Si cette perspective laisse envisager des possibilités des plus intéressantes et pratiques, elle comporte aussi son lot d’aspects plus sombres. La technologie a fait un bond prodigieux en avant en un laps de temps extrêmement court, et nous sommes encore dans une phase d’adaptation et de transition amenée par ces outils. Comme tout outil, on peut s’en servir pour construire… ou détruire.
Qui ne connaît pas un troll, ces gens qui s’acharnent sur les autres sur les médias sociaux? Si certains versent dans l’humour et savent doser leurs interventions, plusieurs s’acharnent sur certaines personnes, parfois en groupe, polluant leurs réseaux en se moquant d’eux à répétition, en tournant en dérision l’ensemble de leurs propos ou encore en s’attaquant directement à leurs cibles en les bombardant d'insultes, parfois même en leur proférant des menaces ou en tenant des propos violents.
Ça ne vous évoque pas quelques mauvais souvenirs (plus lointains pour certains) d’ados désagréables du secondaire? Lorsqu’on s’acharne sur quelqu’un à répétition, c’est de l’intimidation, puis ça empêche un dialogue constructif et rend impossible tout débat d’idée. Bien qu’au début, les conséquences se limitent généralement à faire passer une mauvaise journée à la personne intimidée, elles peuvent devenir beaucoup plus graves à long terme, surtout lorsqu’elles touchent des personnes vulnérables. Visiblement, lorsqu'on observe nos médias sociaux, de tels comportements ne sont pas que l'apanage des adolescents. Est-ce vraiment nécessaire d’agir ainsi chez les adultes?
Contrairement à une certaine époque où l’intimidation se déroulait à l’école (ou au bureau) et que l’on était tranquille une fois à la maison, avec les technologies d’aujourd’hui, la cyberintimidation, ça peut-être 24 heures sur 24, Facebook et Twitter ne dormant jamais.
Je suis enseignant d’univers social de formation. Durant mon Bac et mes stages, il était clair que de combattre la cyberintimidation et les dérapages violents sur Internet chez les jeunes était une priorité dans les écoles. Pièces de théâtre sur le sujet, campagnes de sensibilisation, partenariats avec la fondation Jasmin Roy, de nombreuses mesures étaient mises en place pour sensibiliser et faire changer ces comportements.
Un événement m’a particulièrement déçu récemment. Une collègue à moi, après avoir écrit un texte d’opinion, fut vertement critiquée. Jusque-là, rien d’anormal, les médias sociaux sont un lieu propice aux échanges (parfois plus musclés) et lorsque l’on écrit, il faut s’attendre à être critiqué. On reste dans le débat d’idées, on discute, c’est respectueux.
MAIS…
Quelques individus sont venus s’en prendre à sa personne, l’attaquant elle plutôt que ses propos. Elle a reçu des commentaires déplacés en message privé, on a étalé des aspects de sa vie privée et on l'a rabaissée de façon publique. Bref, on s’est acharné sur son cas au lieu de s’en tenir à la critique de ses idées. Ma déception : certains des individus ayant participé étaient des enseignants qu’elle avait eus au secondaire.
Si on demande à nos jeunes de se responsabiliser et de bien se comporter sur les médias sociaux, ne devrait-on pas nous responsabiliser nous-mêmes en tant qu’adultes et donner l’exemple?
Les médias sociaux sont un outil récent que l’on apprend encore à apprivoiser, ne perdons pas l’opportunité de s’en servir pour construire plutôt que pour détruire.