D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été awkward. L’enfance, ça allait : mes figurines Hamtaro et mes Pokémon ne me jugeaient pas. Ma famille disait que j’étais « originale » et c’était pas mal tout. L’adolescence n’a pas été aussi clémente. Elle a été rough en maudit, en fait.
J’étais la petite fille qui avait un passe-droit à la bibliothèque, car j’y étais trop souvent. Je pouvais emprunter dix livres par semaine et non trois (comme les autres élèves de mon école). Chaque semaine, j’allais voir la bibliothécaire et je remettais ma dizaine de livres, pour en reprendre une autre pile. Je lisais sans arrêt, car je trouvais ça trop dur, voire impossible de devenir amie avec les autres filles et garçons et, ce, à 10 ans. Pourtant, je n’étais pas méchante ni maligne, ni stupide, ni trop moche, ni rien de particulier. J’étais juste bizarre et je parlais trop. Le pire, c’est que je ne faisais rien de vraiment weird. C’est comme si la place que je prenais était de trop, tout le temps. J’avais beau me squeezer le plus possible, mon awkwardness sortait de partout.
J’ai fini, comme beaucoup trop de gens, par porter un masque. J’étudiais chaque jour le comportement de mes amis.es afin de me rapprocher des « standards » généraux et approuvés en matière de relations sociales. Je commençais à me faire inviter à des partys, on me disait « allô » dans les corridors, je suis tombée amoureuse, j’ai fait l’amour à 14 ans parce que mes amies le faisaient et qu’elles étaient donc ben nice. Bref, mon plan fonctionnait. Je comprenais la game, sans en faire partie. J’étais un excellent caméléon relationnel.
Maintenant, je suis une adulte (lol) et, chaque jour, j’essaie d’assumer mon côté awkward. Pour mes proches, ce côté se sent par mes jokes poches (la première qui me vient en tête, c’est quand j’ai dit « pourquoi pain? » quand on m’a offert du pain dans un commerce. C’est rendu un running gag avec mes amis.es!). Je suis celle qui dit « toi aussi! » quand le serveur me souhaite un bon appétit; je suis celle qui bégaie légèrement quand toutes mes idées s’enchaînent trop vite dans ma tête (et ça va tout le temps vite dans ma tête); je me laisse des petits mots drôles à moi-même dans mes affaires (en me trouvant tordante toute seule); je suis la première tipsy dans les party, comme ça je me sens plus confiante (je travaille sur ce point…), etc.
C’est encore très difficile quand je suis dans des groupes de gens dans lesquels je ne me sens pas 100 % à l’aise. Je suis souvent sur le chemin du retour vers chez moi, en me passant par la tête ma soirée mille et une fois, en regrettant toujours plein de petites choses que j’ai dites (ou pas dites) ou faites.
L’important, c’est que, moi, je me trouve pas mal drôle avec mon « pourquoi pain? ». Le reste, ça va venir plus tard.
Et vous, ça vous arrive de vous sentir awkward?