Sclérose en plaques ou céphalées de tension? La petite histoire de mon pire cauchemar
Nathalie SlupikNoël 2012 : Le matin du 25, je me réveille avec un mal de tête incroyable. Je passe la journée allongée à écouter le film Les Intouchables à répétition. Depuis ce jour maudit, j’ai eu des céphalées de tension presque tous les jours, et ce n’est malheureusement pas une exagération.
Été 2015 : Je suis allongée dans mon lit, un matelas sur le sol. Mon copain de l'époque dort profondément à côté de moi, il fait chaud, j’ai la tête qui tourne. Un peu comme lorsque l'on fait de la fièvre. Rien n’y fait. Que je sois debout, couchée, assise, cette sensation ne me lâche pas depuis le matin. Ça me rend de plus en plus angoissée, j’ai peine à respirer. Je me lève, passe par-dessus mon copain en prenant bien soin de ne pas le réveiller. Je vais m’asseoir dehors, la fraîcheur me fait du bien, mais les étourdissements ne passent pas et ne m’ont jamais quittée depuis. Pas plus que mes céphalées.
À l’automne dernier, j’ai décidé de passer un IRM. Ce fut très long, mais comme je ne suis pas peureuse, je me suis endormie dans la machine et il a fallu recommencer #LolPasLol. Une fois mes résultats obtenus, je fonce à la clinique où l’on m’avait recommandé ce scan. Là, on m’annonce qu’il est certain à 99 % que les petites taches blanches dans mon cerveau veulent dire que j’ai la sclérose en plaques. La médecin m’annonce ça sans broncher et poursuit son discours sans même me regarder. Je ne comprends pas. Des larmes s’échappent de mes yeux malgré moi. Elle me regarde enfin, part à rire : « Mais non, ne t’en fais pas, la sclérose en plaques, ce n’est pas si grave! »
Pas si grave? Connaissant bien la liste infinie des symptômes de cette maladie, je n’étais pas exactement de cet avis. La sclérose en plaques est une maladie qui fait en sorte que le corps s'autodétruit progressivement et qui allait bouleverser ma vie entière. Allais-je pouvoir compléter mes études? Allais-je perdre l’usage de mes jambes, ne plus jamais pouvoir danser, nager, courir, aller où bon me semble sans dépendre de qui que ce soit? Allais-je, tout simplement, pouvoir vivre mes rêves? Je sais bien que de nombreuses personnes souffrent de cette maladie et vivent une existence épanouie, mais d’autres en meurent jeunes, d’autres n’ont pas cette chance. Et même si je me disais bien fort que j’allais tout faire pour m’adapter à ma nouvelle vie, ça reste très dur, comme adaptation. À l’idée, je veux dire, puisque je n’ai jamais eu la sclérose en plaques.
En effet, au mois de mai dernier, après six mois d'attente interminables, j’ai enfin vu un neurologue. Il a brièvement regardé mes radiographies, m’a examinée encore plus rapidement, puis a confirmé que je souffrais « seulement » de céphalées de tension et qu'il n'y avait « rien là ».
En sortant du bureau du médecin, on m’a demandé si j’étais soulagée. Eh bien, pour être franche, je ne ressentais rien du tout. D’abord, parce que j’étais épuisée émotionnellement. Épuisée de ces mois d’attente à ne pas savoir, à craindre le pire. Des mois durant lesquels j’avais de la difficulté à fonctionner, à aller à mes cours. À ma dernière session d’université, j’ai dû abandonner la moitié de mes cours parce que je n’arrivais pas à les suivre, après une crise d’angoisse dans l’auditorium d’un examen. Plus j’étais anxieuse, plus mes symptômes physiques augmentaient, et je perdrais peu à peu toute force de continuer. À la fin, je n’avais même plus le courage de faire mon épicerie, tout m’angoissait. Tout était trop, même les choses qui me passionnaient.
Ensuite, parce que je me suis sentie terriblement seule là-dedans. Personne ne pouvait m'aider, me donner des réponses. Je me sentais coupée des autres et de moi-même, de ce corps que je ne comprenais plus et qui me trahissait. J’avais beaucoup d’espoir en ce neurologue qui était censé m’aider. Mais son examen de dix minutes à peine et ses explications très limitées sur mes céphalées de tension ne m’ont pas apporté grand-chose, sauf un peu plus d'amertume.
J’ai aussi l’impression que les médecins minimisent beaucoup les céphalées de tension. Soudainement, mes étourdissements, mes engourdissements et tout ce qui était si grave quand c’était peut-être un signe de sclérose ne l'est plus, car on les regroupe sous un autre nom. Pour moi, la souffrance reste autant inconvéniente. Quant à cette autre médecin, qui s’est permise de me donner un diagnostic qu’elle n’était absolument pas en mesure de prononcer…
Aujourd’hui, je ne me sens pas tellement mieux. Je ne suis pas davantage soulagée. Même si je suis contente de ne pas avoir la sclérose en plaques, j’aurais quasiment préféré avoir un mal plus clair et qu’on s’occupe de moi. Parce que, d'après ce que mon neurologue m'a dit, il n'y a pas encore de vrai traitement pour les céphalées de tension. Il m’a prescrit des antidépresseurs et m’a dit que si ça ne fonctionnait pas, il n’y avait rien d’autre à faire. À part aller voir des chiros, des osthéopathes, faire du yoga, méditer, tâtonner à gauche et à droite pour soulager la tension. Tâtonner à l’aveuglette, dans le vide. J’en ai assez de ce vide, j’en ai assez de ne pas savoir. J’aimerais juste arrêter d’avoir mal, arrêter d’avoir soudainement besoin de m’asseoir parce que je n’ai plus d’équilibre, arrêter d'être limitée dans mes activités quotidiennes par mes douleurs. Me sentir en santé, comme la jeune fille de 21 ans que je suis.
Mais ça va aller. Simplement parce que j'ai décidé d'être ma propre bouée de secours et que je n'ai pas l'intention d'abandonner.
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