Il y a des matins où l’on se lève et la vérité nous frappe : notre vie a changé sans qu’on s’en rende vraiment compte. En prenant mon café bien tranquille, je défile l’actualité de mon Facebook. Tiens, cette amie s’est acheté une nouvelle maison! Ah ben, un deuxième garçon pour ce couple-là.
La même semaine, je reçois un texto d’une amie proche qui m’annonce une première grossesse. La dernière en fait, à part moi, à fonder une famille. Ça m’a frappée. Tous mes amis ont des enfants. Ils sont tous propriétaires; ils ont tous une hypothèque. Ils ont une carrière, habitent en ville ou en campagne : peu importe, ils sont en train de faire leur vie. Ils ne craignent pas de vieillir.
Pas moi. Je suis l’irréductible trentenaire qui ne veut pas vieillir. Celle qui n’a pas d’attache, qui n’a pas de job steady et qui ne sait même pas trop où elle veut aboutir. Certaines journées, je veux terminer mon doctorat, à d’autres moments je voudrais réorienter ma carrière. Je n’ai pas de plan de match ni de REER dans un compte en banque.
Je veux des enfants, mais je ne veux pas perdre ma liberté de faire tout ce qui me plaît. Décrisser dans le bois pour cinq jours sur un coup de tête, partir en Europe sans trop planifier mon itinéraire. Défoncer mon budget alloué pour ma séance de magasinage. Je ne suis pas prête à délaisser mon impulsivité.
Mon instabilité – ou ma liberté – est enviée par les autres peut-être, car le gazon est toujours plus vert chez le voisin. Toutefois, mes indécisions face à mon futur minent tranquillement mon couple, alors que nos intérêts s’éloignent. Est-ce que je dois inévitablement m’établir quelque part? Fonder une famille? Un jour j’en ai envie, mais le lendemain je fuis ce destin comme la peste.
Je ne pense pas que mes amis réussissent mieux ou moins bien leur vie que moi. Ils vivent à leur rythme; leur existence rêvée. Je les admire et parfois, je jalouse leurs vies stéréotypées. J’ai peur de me réveiller un matin et de réaliser que je suis restée dans le passé. Je suis une éternelle adolescente. J’ai peur de passer à côté de quelque chose, de me retrouver seule parmi toutes ces nouvelles cellules familiales.
La FOMO me cimente dans une position que je trouve inconfortable. Je suis à la croisée des chemins et je peine à prendre une décision. Moi qui préfère me laisser porter par la vie, devrais-je provoquer mon destin? J’ai peur de faire le saut. J’ai peur d’être comme les autres. J’ai peur de devenir une « matante ».
J’ai peur de vieillir.