Étant donné quon ma délesté du mandat strictement mode de mes posts, je ne peux pas ne pas parler du show dArcade Fire dhier soir (le 22 septembre), à la place des Festivals pour les 10 ans de POP Montréal. Ah, ah! Je précise comme si je parlais du dernier spectacle dun groupe obscur à loccasion dun festival occulte

Non, hier, un grand frisson de fierté à traversé le Centre-Ville, comme une onde dallégresse sur la foule dense et tentaculaire massée autour de la scène Sirius XM. Le public a dansé sur Kid Koala, applaudi Karkwa (ambassadeurs francophones de la soirée) et acclamé en liesse le clou de la soirée (soyons francs) : « nos » Arcade Fire nationaux.
Le plus souvent, jai tendance à trouver ridicule lengouement dithyrambique qui accompagne certains évènements musicaux. Les gens qui deviennent complètement fous à lidée de voir sur scène un groupe X ou Y, qui bodysurfent 2 minutes après le début du show sur un high quelconque et qui affichent hors-contexte leur allégeance musicale à une formation en particulier, penchent à mes yeux du côté « lourd, sérieux! » de la balance.
Mais aujourd'hui, je vous fais un aveu. Avec le cas « Arcade Fire », jen suis venue à un constat, ou plutôt: pour la première fois, je comprends et ressens le « spirit » qui peut découler dun amour partagé à grande échelle pour un groupe musical. Eh non, je nai pas eu une préadolescence empreinte didolâtries et de fixations sur des chanteurs ou des bands dados un peu révoltés. À part retenir maladivement (en intégral et un peu malgré moi) tous les raps dAmour Oral de Loco Locass, je nai jamais eu la Passion.
Mais à présent, jai compris quelque chose. Il me fallait simplement un groupe qui me rejoigne vraiment pour amorcer le déclic. Le truc avec Arcade Fire, cest que leur popularité transcende la simple appréciation musicale. Le groupe, de par ses origines, sa vibe et son allure, rejoint un public largement répandu, mais qui, habituellement, reste discret et divisé entre lappréciation de plusieurs musiciens underground sans nécessairement ressentir le besoin (par snobisme ou indifférence) de partager leur expérience musicale avec une crowd.
Or, avec Arcade Fire, cas dexception, un groupe originellement très underground rallie les indie fans à un point dappréciation commun, et surfe sur cette cohésion pour exalter lenthousiasme de son public, sans jamais pervertir son authenticité.
Lorsquils ont gagné leur fameux Grammys au printemps dernier, un journaliste du New York Times rapportait avec perspicacité : « The indie-rock heroes Arcade Fire [won] for The Suburbs, the first time a band solidly in the alt-rock world has taken that top category ». Il disait vrai. Et ce quil y a de plus remarquable, cest que leur essor a été porté par leur marginalité. Encore mieux, suite à leur victoire controversée, le groupe a su mettre à profit les réactions négatives du public pop américain incrédule pour donner un nouveau souffle, satirique et délicieux, à sa popularité montréalaise et plus underground. On peut le constater en observant simplement leur choix de T-shirt officiel pour le concert dhier (la photo au début de l'article. Merci à Mlle G. pour le prêt de son torse en image).
Quant à moi, dans la journée du 22, je ressentais une certaine frénésie. Javais envie dêtre folle un peu, en exacerbant mon « particularisme montréalais ». Parce quon se le dira, on vit probablement dans l'une des métropoles les plus riches en culture alternative au monde. Jaime la musique dArcade Fire, certes, mais jaime surtout ce que symbolise la popularité saugrenue du groupe. Éclectique dans sa formation, indie dans sa sonorité et farfelu de sa présence scénique; AF me remue toujours la fierté montréalaise. Quand jécoute leurs albums, particulièrement The Suburbs, je me surprends chaque fois à constater avec émoi quil pourrait sagir de la trame sonore de mon existence. Comme si on chantonnait doucement mes souvenirs denfance, mon adolescence, laube de ma vie dadulte et la promesse de mon avenir. Alors pour jouer le jeu (et pour dautres raisons), je me suis même abandonnée à cette bouffée dorgueil métropolitain : Allez hop! Du fuchsia sur la nuque!

(Ce nest pas une blague. Like it or not.)
Bref, tout ça pour dire quau terme de la soirée, après avoir flâné longuement au beau milieu du parc coin St-Urbain et de Maisonneuve en sirotant un gin-gingerale, je suis remontée sur la place des festivals désertée de ses milliers de badauds pour y écouter la ville sendormir. Montréal illuminée soufflait doucement son air de septembre, et au murmure des cliquetis des gobelets abandonnés qui jonchaient le sol, jai fredonné :
« Let the century pass me by
Standing under the night sky
Tomorrow is nothing…