Je vais commencer en indiquant que c’est un privilège et un sacrifice que de pouvoir compléter un stage non rémunéré.
C'est un privilège parce qu'il faut du temps et de l'argent pour entamer un stage à temps plein non rémunéré, et ce n'est pas tout le monde qui a les moyens d’arrêter de travailler pendant son stage pour faire toutes ses heures. L'option qui se présente le plus souvent est donc d'être en stage de 9 h à 5 h et ensuite travailler en soirée et la fin de semaine. C’est assez malsain, avouons-le. Autrement, ça implique de quitter l'emploi qu'on occupe déjà sans avoir la certitude d’être réembauché.e ensuite, et surtout, s’assurer d’avoir travaillé assez d’heures pour ne pas manquer d’argent lors dudit stage. Avec un stage rémunéré ou si nos parents ou notre entourage peuvent nous soutenir financièrement pendant ce temps, il est alors possible de ne pas travailler du tout.
Revenons maintenant aux stages. Un stage est réalisé en cours ou fin de formation et est un complément aux acquis théoriques. C’est une occasion de comprendre comment la théorie se vit sur le terrain. En ce sens, il est impensable d’exiger d’un stagiaire productivité et efficacité. Oui, l’objectif est qu’en fin de stage, cette personne soit aussi efficace qu’un employé de l’entreprise. Sauf que le stage est un processus d’apprentissage à lui seul.
Dans certains domaines, comme le mien, Éducation à la Petite Enfance, les stages sont essentiels. Parce que les enfants sur papier, bien qu’inspirés de cas vécus, sont toujours plus faciles à gérer. Il était donc normal qu’à mon premier stage, je n’étais pas efficace à 100 % lors de mes interventions avec les enfants.
En ce sens, est-ce aux entreprises d’assumer le coût de nos formations? Ne nous priverions-nous pas d’expériences extraordinaires en demandant cela? Ton Petit Look accueille de nombreuses stagiaires et ne rémunère pas ses auteur.e.s. Par contre, c’est une expérience qu’on nous offre, une opportunité pour la suite de notre carrière qu’il nous serait impossible d’avoir autrement.
Aussi, lors de mon bac en commercialisation de la mode, j’ai eu la chance d’être accueillie par un OBNL. Mon mandat : aller voir ce que les autres OBNL du même type avaient fait ailleurs dans le monde, dresser un portrait de la situation au niveau de la mode, créer un contact avec les principaux acteurs du domaine et proposer des projets pour mettre de l’avant tout ce beau monde-là! Aurais-je eu l’occasion d’accomplir un stage de la sorte s’il avait été réénuméré? Pas du tout! Je ne connais aucune OBNL qui a un budget suffisant pour inviter un.e étudiant.e à faire une étude de marché de la sorte. La plupart des entreprises lucratives non plus n'en ont pas les moyens. Et pourtant, c’est un des projets les plus motivants qui m’ont été confiés dans ma carrière.
Il est certain que certaines professions exigent des heures de « stage » pour atteindre le statut professionnel. En ce sens, il est normal que ces employé.e.s soient payé.e.s. Leur formation est terminée et iels ne font que prouver leur motivation à entrer dans la profession. L’exemple le plus près de moi est l’architecture. Pour être membre de l’ordre des architectes du Québec, ça prend une maîtrise plus X nombre d’heures de « stage ». Ces « stages » peuvent être entamés lors de la formation universitaire de premier cycle (bac). En ce sens, tant qu’un.e aspirant.e architecte n’est pas membre de l’ordre et ce, pratiquement dès son entrée au bac, son titre est « stagiaire en architecture ».
Fait cocasse : comme certain.e.s choisissent de ne jamais faire la maîtrise, iels demeurent « stagiaire en architecture » toute leur vie. Dans des cas comme celui-ci, et pour tous les ordres professionnels, ces stages doivent être réénumérés. Soit par l’employeur, soit par l’Ordre lui-même. On ne peut exiger d’un.e aspirant.e architecte de travailler chez Tim Hortons et dans un bureau professionnel pour cumuler ses heures de stage.
J’aimerais terminer en vous disant que, peu importe que vous soyez payés ou non, que ce soit qualifié de stage ou non, que ce soit dans le cadre de vos études ou non. Si vous acceptez un poste, acceptez-le parce qu’il vous plait! Faites-le pour vous, pas parce que ça va bien paraître sur votre CV!