Réagir quand je vois passer des trucs qui attaquent les principes de base de la diversité corporelle est devenu comme une seconde nature chez moi. Je pense vraiment que les idées marketing et les items en vente sur le Web devraient suivre une ligne de conduite afin de changer les choses pour de vrai et cesser de promouvoir un modèle unique du corps de la femme. Chu de même.
Si je vous dis tout ça, c’est parce qu’hier, sur mon mur Facebook, je suis tombée sur la photo d’une gourde où il était écrit : « Je cours parce que j’aime la poutine ». Même si ça part de la noble intention de faire bouger son corps et de s’entraîner pour une meilleure forme physique, j’ai eu envie de dire un « Ta yeule » bien senti. À la place, j’ai écrit une phrase un peu toute faite : « Peut-être que la personne devrait courir parce qu’elle aime ça plutôt que parce qu’elle aime manger un aliment en particulier. »
Maiiiiis, je vous vois venir à 100 miles à l’heure pour me dire que ce n’est pas vraiment grave. T’sais, y’a des causes plus importantes que de dire qu’il faut faire du sport pour bouger plutôt que pour uniquement changer la forme de son corps. Que le sport, c’est nice, parce qu'au-delà de faire maigrir, ça libère des endorphines. Pis que, t’sais, c’est aussi une façon de se défouler sainement.
Je ne peux pas voir ça sans émettre de réserves. Parce que c’est vraiment dangereux de voir le sport comme une conséquence négative au plaisir alimentaire qu’on peut s’offrir quand ça nous tente. Quand on présente un modèle unique de la femme et qu’on renforce ce modèle-là en bannissant certains aliments parce qu’ils font grossir, personne ne sort gagnant de cette histoire. Ça fait qu’il y a des gens qui se sentent comme de la merde parce qu’ils mangent et qu’ils se punissent d’avoir mangé quelque chose de « mauvais » en faisant du sport. Finalement, cette phrase anodine est proche du problème alimentaire. Pis ce n’est pas bon pour la perception de soi.
D’ailleurs, pour parler de mon malaise et vérifier si je n’étais pas à côté de la plaque ou juste un peu trop sensible à ça, j’ai cogné à la porte (virtuelle) de mon nutritionniste préféré, Bernard Lavallée, pour lui demander ce qu’il pensait de tout ça. C’est drôle parce qu’il travaillait pas mal au même moment sur un article du même sujet. Quand toute est dans toute. En gros, il m’expliquait (et ce sera beaucoup plus détaillé dans son billet qui paraîtra prochainement) que courir parce qu’on mange une poutine, c’est une motivation négative pour faire du sport. C’est beaucoup plus sain de bouger parce qu’on aime ça ou parce que ça nous fait du bien. D’ailleurs, maigrir seulement en faisant du sport, c’est vraiment difficile. Même si une poutine, ce n’est pas nutritif et qu’on devrait en manger le moins possible (bouhou, c’est ce que j’aime le plus manger au monde), il ne faut pas non plus rentrer dans une logique de faire du sport = poutine. Le fait est que la nutrition, c’est vraiment plus complexe qu’on ne le pense, et qu’il n’y a pas juste les calories qui comptent dans la vie. Bref, ce genre de discours (poutine = courir) est wrong.
Bon, pour celles qui sont parties en peur parce que la poutine, ce n’est pas nutritif, Bernard ajoute qu’en manger de façon très occasionnelle rend heureux même si ce n’est pas optimal comme repas! C’est pour ce genre de trucs que je l’aime autant et que j'ai dévoré son livre.
Je vous invite à lire des sites qui sont spécialisés là-dedans si le sujet de la nutrition vous intéresse et que vous êtes tannée de lire n’importe quoi et, surtout, de voir des raccourcis aussi dangereux se propager sur le net à coup de partages Facebook. Outre l’excellent site de Bernard Lavallée, j’adore aller sur le site de Extenso pour y lire des articles qui démystifient vraiment la nutrition.
Bref, mangez de la poutine si ça vous tente et faites de la course aussi si vous le voulez bien, mais ne vous punissez pas en faisant du sport sous prétexte que vous avez mangé quelque chose que vous avez aimé ou parce que vous avez fait la fête en fin de semaine ou whatever.