Entre le #MAtvGate et la tête de porc laissée lâchement sur le perron d'un lieu culte musulman, je me demande encore pourquoi certains remettent en question la latente présence du racisme au Québec. Je ne suis pas la seule. En ce moment, une pétition pour la création d'une commission de consultation sur le racisme systémique au Québec est en ligne sur le site de l'Assemblée nationale.
Cette commission a pour but d'amener les gens à mieux comprendre ce qu'est le racisme et de provoquer une réflexion collective sur la problématique afin de trouver des solutions. Pour le moment, le manque d'outils politiques et légaux pour illustrer l'intersectionnatlité des oppressions fait défaut.
Racisme systémique, de quessé?
Le barreau du Québec le définit ainsi : « Nous entendons par racisme systémique la production sociale d’une inégalité fondée sur la race dans les décisions dont les gens font l’objet et les traitements qui leur sont dispensés. L’inégalité raciale est le résultat de l’organisation de la vie économique, culturelle et politique d’une société. Elle est le résultat de la combinaison de ce qui suit : la construction sociale des races comme réelles, différentes et inégales (racialisation); les normes, les processus et la prestation des services utilisés par un système social (structure); les actions et les décisions des gens qui travaillent pour les systèmes sociaux (personnel). »
Le jargon légal pourrait simplement se résumer ainsi : le racisme est intrinsèquement systémique, puisqu'il se base sur un système où un acteur, le « privilégié », est favorisé au détriment d'un autre, le « racisé ». Le racisme se manifeste à petite ou grande échelle, dans toutes les sphères de notre société; santé, travail, justice, éducation, alouette.
Ces actes discriminatoires sont entre autres fondés sur des caractéristiques sociales construites à partir de stéréotypes culturels que l'on assigne à tort à la communauté visée : la femme musulmane est soumise, le Noir est dangereux, l'autochtone est paresseux, etc. Le racisme culturel s'avère être la forme de discrimination la plus répandue.
Elle est aussi, à mon avis, la plus sournoise et la plus dangeureuse. Les médias nous bombardent d'idées préconçues sur les communautés ethniques. Une publicité subliminale qui contribue à renforcer ce système d'oppression, qu'il devient de plus en plus difficile de défaire et de déconstuire. Des stéréotypes qui deviennent des vérités pour certains et même des arguments pour justifier un comportement déplacé. Bref.
Pourquoi signer la pétition?
Quelques statistiques, juste au cas où…
- Durant les dix dernières années, la population carcérale autochtone a grimpé en flèche et a augmenté de 46,4 %. Pour les Noirs, on parle de 90 %.
- Il existe encore de la discrimination à l'embauche basée sur le nom, la nationalité et la religion. Lors d'une entrevue, on m'a déjà demandé si j'étais pratiquante et si j'étais du « genre » à faire le ramadan. #TrueStory
- 30 % de la population montréalaise est composée de personnes racisées. De ce nombre, on compte 5,9 % de minorités racisées ayant des postes dans la fonction publique. Je dis ça, je ne dis rien.
- 4 élus sur 103 sont issus des minorités visibles, et ce même si nous composons 30 % de la population.
Toujours pas convaincus?
Ne vous méprenez pas, je ne dis pas que TOUS les Québécois sont racistes. Loin de là. Je dis simplement qu'il ne faut pas se voiler la face et admettre que nous avons aussi notre lot de problèmes raciaux.
Lorsqu'une animatrice ne se gêne pas pour utiliser des termes comme « basané » et « bridé » pour exprimer son mécontentement à l'égard de son non-renouvellement et de son remplacement par une personne racisée, ou qu'un animateur de radio y va d'une longue tirade composée de propos tout simplement ignobles pour parler de la communauté haïtienne, je me dis qu'on n’est pas sortis du bois.
Quand un sondage réalisé par la firme Léger en 2015 révèle que 20 % des Québécois se déclarent ouvertement racistes, j'ai envie de flipper des tables. Je ne sais pas pour vous, mais moi, ces chiffres me donnent tout simplement froid dans le dos. Et ça me fait peur.
Est-ce que je parle en connaissance de cause? Oui. Ai-je déjà été victime de racisme, de propos déplacés, intolérants, xénophobes? Oui. Ai-je déjà passé des soirées à tenter de justifier ma présence au Québec, à expliquer que non, les musulmans ne sont pas là pour envahir la province et que oui, nous dénonçons les actes terroristes? Oui et même plus d'une soirée!
C'est pour ces raisons, entre autres, que j'ai signé la pétition. Mais c'est surtout pour mes enfants que je l'ai fait. Un genre de pacte avec eux. Une promesse d'un monde plus tolérant, d'un environnement sain et sécuritaire, là où ils pourront s'épanouir, peu importe leur confession religieuse, peu importe leur mode de vie. Je me bats pour eux. J'ai signé pour eux. Je vous encourage à faire de même, histoire que l’on vive dans une société égalitaire.
Juste pour ça, vous devriez signer.
Avez-vous déjà été victime de racisme? Allez-vous signer la pétition?