Mon ex, appelons-le Ben, était super romantique, attentionné et ouvertement féministe (comme dans le texte d'Alex). Il m’aimait sincèrement. Il était doux et il disait qu'il avait peur de me briser! C'était mon premier partenaire sexuel et j'étais aussi sa première. Notre éducation sexuelle se limitait à des petits cours lointains où une madame awkward distribuait des condoms pis du déo, dans une classe rouge tomate, dans l’temps qu’MSN chat existait. Nous avons donc appris « sur le tas ». Mes amies, Internet et la télévision m’avaient montré que les jeunes couples faisaient tout le temps souvent l’amour, donc pour moi, c’était ça, la norme.
Au début, tout allait bien, nous découvrions nos corps avec amour et passion. Après quelques mois, ma libido avait descendue, mais pas celle de Ben. Normal, ça arrive dans plusieurs couples! Sauf que je me sentais mal parce que, dans ma tête, il fallait que j’aie envie de faire l’amour tout le temps. Je ne voulais pas être le cliché de la femme qui s’invente un mal de tête pour refuser les avances de son mari.
Aujourd’hui, je sais que cette femme a raison. Quand Ben et moi dormions ensemble, il fallait qu’on fasse l’amour avant de dormir et pendant la nuit. J’avais l’impression qu’il avait comme mission d’éjaculer plus d'une fois par nuit et que s’il n’y parvenait pas, il était frustré et déçu de lui-même. Il n’y a pas une seule nuit où il ne m’a pas réveillée avec des caresses. Ça n’avait pas l’air méchant. Il ne m’a jamais crié dessus ou blessé physiquement pour que j’accepte.
Par contre, il aurait dû comprendre que lorsque je disais « je suis fatiguée », ce n’était pas une invitation à insister, mais plutôt une invitation à me laisser dormir, simplement. Sauf que Ben insistait toujours. Il me disait que j’étais belle, qu’il m’aimait, qu’il avait envie de moi. Je finissais par me laisser faire, non pas parce que j’en avais envie, mais pour qu’il me laisse dormir après. C’est là, le problème. Ce n’était pas un consentement.
Le consentement, c’est quand les deux personnes se font comprendre qu’elles ont envie d’avoir une relation sexuelle. Dans mon cas, j’avais envie de dormir. Avant de quitter Ben, je n’avais pas réalisé qu’il me violait. C’est avec du recul et beaucoup de lecture de témoignages que j’ai fini par comprendre que le consentement n’est pas juste une histoire de one night ou de gars louches dans des party, c’est aussi une histoire de couple.
Je n'ai jamais dit à Ben qu'il était un violeur, j'ai peur de le détruire, mais en même temps, je ne veux pas qu'il refasse la même chose à d'autres filles. Même si on parle ici de « viol ordinaire », il ne faut pas atténuer l'importance de l'acte. Au contraire, il faut en parler parce que beaucoup trop de gens subissent ça en silence. Ils n'en parlent pas parce qu'ils ont peur de se faire dire que « ce n'est pas si grave ». Oui, c'est grave, et oui, c'est important d'en parler.
C’est extrêmement difficile de s’avouer qu’une personne qu’on aime nous viole. Mais il faut arrêter de croire qu’un « je t’aime » est une invitation VIP dans nos petites culottes. La notion du consentement sexuel est autant importante dans un couple qu’avec un inconnu. Même si c’est votre amoureux et qu’il n’est pas violent physiquement, il n’a pas le droit de transformer un « non » en « oui ». Ceci s’applique autant pour les filles que pour les garçons.
Beaucoup trop de gens vivent des premières relations sexuelles nébuleuses dans lesquelles ils ne savent pas trop « ce qui est normal ou pas ». Je vais vous dire ce qui est normal : assurez-vous toujours que votre partenaire soit consentant avant (avec un p’tit « ça t’tentes-tu? », par exemple) et de s'assurer que le consentement continue pendant vos relations sexuelles. Puis, il n’y a pas de fréquence « normale » à laquelle faire l’amour, ça peut être tous les jours autant qu’une fois par année! Il ne faut pas se mettre de pression sur soi-même et sur l’autre en pensant que votre sexualité sera plus « saine ».
Je sais que le consentement a la réputation de ne pas être sexy, mais un viol, ce l'est encore moins.
Avez-vous déjà vécu une situation similaire? Comment avez-vous fait pour vous sentir mieux par rapport à tout ça?