Normcore : oser être plate

Qu’est-ce qu’être normcore? Un nouveau courant littéraire? Le chien de Janette Bertrand? Non. C’est une nouvelle tendance mode. Une anti-tendance, si on veut. Certains diront qu’une anti-tendance a toujours la possibilité de devenir une tendance en soi, et effectivement, c’est ce qui semble être en train de se produire ici. Oups.

Normcore : fadeur stylisée, un laisser-aller de la nécessité de se démarquer, d’être unique et d’avoir un caractère distinctif. S’habiller pour ressembler à monsieur-madame-Tout-le-Monde. Ne pas faire de fashion statement, outre le statement de ne pas vouloir faire de statement.

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Être normcore, c’est adopter un look commercial, générique, fade et surtout vide. Le but et de créer essentiellement une toile vierge, dans un sens, ou une identité délavée qui ne sort pas du lot.

Une paire de mom jeans bleu pâle, un t-shirt sans forme de chez Zellers et surtout une paire de bas blancs. Un clin d’œil sarcastique aux jours de gloire du centre d’achats des années ’90. Oui, il y a eu des gens avec un look fade depuis que le monde est monde, mais le look normcore a ses racines dans la décennie 1990.

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Le confort fait partie de la game, autant que montrer notre amour pour les grosses marques comme Adidas, Nike et Gap. Sans oublier les espadrilles, quasi essentielles au look normcore.

Prenons l’exemple chouchou du mouvement, Steve Jobs. Son uniforme de tous les jours était le suivant : des jeans de papa, un col roulé noir et des espadrilles. Aujourd’hui, dans la vingtaine, il serait turbo normcore. Est-ce que ses vêtements ont influencé notre perception de Jobs? Absolument pas!

Personnellement, je connais l’esthétique normcore depuis au moins 2 ans. Certains puristes de la mode diront que le mouvement existe depuis encore plus longtemps. Aujourd’hui, le normcore est une tendance qu’on retrouve dans le high fashion comme avec des espadrilles chez Chanel, vu pour la première fois la saison passée. Et voir des bas blancs avec des talons haut est devenu monnaie courante dans les éditoriaux mode.

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Nous vivons maintenant dans un monde où tout est tendance, en même temps. On n’observe plus une tendance par saison puisque l’industrie nous garroche tout du même coup. Dans 20 ans, quand les étudiants en commercialisation de la mode devront faire des recherches sur les tendances des années 2010, ils n’auront pas assez de place dans leurs scrapbooks digitaux pour tout mettre.

Notre attitude face à la mode a changé. Peut-être est-ce la culture du street style qui a tout chamboulé, mais il me semble qu’aujourd’hui on essaie juste too much. La mode et le style devraient pouvoir coexister naturellement, être un prolongement de notre identité propre, une réflexion de toi. (Porter toutes les tendances printemps 2014 dans le même outfit, méga don’t!)

Est-ce que le normcore se positionne en réaction au trop-plein des tendances? Est-ce que les gens sont tannés d’être perçus uniquement comme des consommateurs? Est-ce que porter la même tenue que le mononcle de Val-d’Or est un fashion statement politique? Sommes-nous en train de rejeter les marques (et notre emploi comme billboard publicitaire?)

Pour moi, le normcore, c’est plutôt une façon de se bâtir une identité séparée de nos vêtements. Comme avec Jobs, le but c’est d’être jugé pour ce que l’on est, et non ce que l’on porte.

Peut-être que le normcore est une nouvelle opportunité. Si on porte tous la même chose, on ne pourra plus se juger (ou presque). Ce sera peut-être plus facile de mettre Instagram de côté, le temps de jaser de col roulé blanc avec un inconnu. Je veux dire, sans un rottweiler Givenchy enragé sur nos chandails, la jasette devrait être plus facile…

Seul le temps nous le dira. D’ici là, que la révolution normcore commence!